Ma maman est en Amérique, elle a rencontré Buffalo Bill
Dans les années 70, Jean, 6 ans, fait sa rentrée en CP. Sa mère est « partie en voyage », son père, petit industriel, presque toujours absent. Mais Jean se délecte des cartes postales que lui lit sa jeune voisine, Michèle. Des récits de voyages extraordinaires qui auraient été expédiés par la mère de Jean...
Adapté d’une émouvante BD autobiographique signée Jean Regnaud, ce film d'animation est une œuvre bancale. Son graphisme simple et épuré paraît manufacturé de bout en bout pour plaire aux tout‑petits. La plupart de ses péripéties (longue scène de bataille de billes) plaident aussi en ce sens. Mais, dans le fond, ce récit sur une fin d’innocence assez cruelle ‑il ne faut pas être grand clerc pour deviner le fond de l’histoire‑ se révèle plus un regard nostalgique d’adulte sur les démêlés de l’enfance qu’un vrai film pour les petits.
La fin de l’innocence est un beau thème, Le voyage de Chihiro en témoigne (la musique de Ma Maman… singe d’ailleurs souvent la partition de Joe Hisaishi), mais Miyazaki avait tout de suite joué cartes sur table. Son œuvre était clairement pensée pour les adultes et les adolescents. Ma maman…, lui, brouille tant son propos qu’il risque finalement de ne plaire à personne, comme semblent en témoigner ses très modestes entrées (105 000 entrées France).
Pourquoi ? Parce que les grands s’y ennuieront ferme face à un récit non conçu pour eux tandis que les kids, eux, s’ils s’attacheront aux personnages touchants et à une bonne partie du récit, risquent d’être traumatisés par un final coupant comme la glace. Disons‑le clairement, il est vivement déconseillé de montrer ce film à des petits croyant encore à l’éternité de leurs parents (et au père Noël), sinon gros trauma à prévoir !
Reste un regret qui naît en regardant le making of du film. Celui-ci montre en effet une petite minute du film d’animation préparatoire ayant permis aux auteurs de trouver des financements. Un pilote extraordinaire : coloré, vivant, inventif en matière de cadrage, riche en audaces graphiques, pêchu en termes de rythme. Cette saisissante séquence contient, en quelques secondes, à peu près tout ce que l'on aurait aimé voir dans le film final.