Lone Ranger, naissance d'un héros
Compte tenu de sa déroute injuste dans les salles obscures, la sortie Blu‑Ray/DVD de Lone Ranger est une aubaine pour les amateurs de bon western et de grand spectacle, soit l'occasion de découvrir un film qui ne méritait pas du tout cet accueil glacial.
Sur le papier, la reformation du trio gagnant de Pirates de Caraïbes, alias Johnny Depp, le réalisateur Gore Verbinsky et le producteur Jerry Bruckheimer, pouvait laisser supposer une simple déclinaison au Far‑West du concept caribéen précité. Il n’en est rien.
Le scénario est évidemment un hommage au western crépusculaire, à la fin d’une époque et à la naissance d’une nouvelle ère, entre grands espaces vierges, chemin de fer pétaradant et chevauchées fantastiques. Un postulat de départ subversif et risqué pour un blockbuster de ce calibre (250 millions de dollars de budget, soit 50 millions de dollars de plus que Pacific Rim).
On suit ainsi la rencontre entre Tonto (Depp), un vieux guerrier indien énigmatique, et John Reid (Armie Hammer), un ancien défenseur de la loi devenu redoutable justicier. Première bonne impression, le récit ne fait pas l’économie du sort macabre réservé aux Indiens à l'époque. Le discours est clair : l’Amérique s’est bâtie sur la spoliation et le massacre des Indiens, puis l’exploitation des ressortissants chinois pour la construction du chemin de fer. Tout y est. Ce qui n'enlève en rien de l’humour et du parti pris spectaculaire voulu par Verbinski.
Autre bonne surprise : les nombreuses références au genre, de l'immense Little Big Man avec Dustin Hoffman en passant par La prisionnière du désert, L’homme qui tua Liberty Valance, Il était une fois dans l’Ouest de Leone, La horde sauvage ou encore Le mécano de la General, et la liste est loin d’être exhaustive. On est loin de la pop culture des super‑héros du moment. On comprend un peu mieux le flop.
Tant et si bien que le film déborde un peu (beaucoup… 30 minutes en moins auraient permis de se recentrer sur les deux principaux protagonistes). Mais dès que Johnny Depp apparaît (le comédien se détache enfin de ces « Jack Sparrowphilies » agaçantes), le film reprend du souffle, retrouve son humour et monte en puissance. La tambouille référentielle un peu fourre‑tout prend alors tout son sens, magnifiée par la mise en scène époustouflante de Verbinski. Il serait donc bien dommage de passer à côté du nouveau western Lone Ranger.