Live by Night
Joe Coughlin (Ben Affleck) n’a rien du gangster lambda. Intègre et loin d’être sanguinaire, il refuse de s’associer aux gangs mafieux de Boston. Le meurtre de son amante Emma (Sienna Miller) commandité par Albert White (Robert Glenister), redoutable chef de la pègre irlandaise, aura pourtant raison de ce choix. Il décide de faire affaire avec Don Maso Pescatore (Remo Girone), le parrain du clan rival, et rejoint la Floride afin d’officier dans la vente illégale d’alcool.
Adapté du roman de Dennis Lehane (Mystic River, Shutter Island), Live by Night trace un itinéraire à contre‑courant de la mythologie mafieuse. Là où l’on s’attendrait à la descente aux enfers d’un ancien paria reconverti en bootlegger (contrebandier qui cachait notamment des bouteilles dans ses bottes), Ben Affleck se construit un personnage bienveillant voire bienfaiteur dont la soif de vengeance s’estompe grâce à sa rencontre avec Graciela la Cubaine (Zoe Saldana).
Le couple mixte qu’ils forment n’est, de toute évidence, pas vu d’un bon œil dans l’Amérique corsetée de la prohibition. L’occasion pour le récit d’insérer les épisodes marquants des années 20, de l’émergence d’un nouveau Klu Klux Klan (plus violent et radical qu’à ses origines en 1866) à la mauvaise conscience partagée par les condisciples puritains d’une jeune illuminée, Loretta Figgis (Elle Fanning). Figure virginale entachée par une expérience sordide à Hollywood, la jeune fille s’est lancée dans une quête de rédemption pas très éloignée de ce qu’elle condamne.
Quoique le réalisateur propose un polar bien documenté et visuellement séduisant, devant la caméra, Ben Affleck alias Coughlin, propriétaire de speakeasy à la morale vacillante, semble peu convaincu par son personnage. Succédant à un chef‑d’œuvre sériel tel que Boardwalk Empire (Terence Winter, 2010‑2014), cette seconde adaptation d'un roman de Lehane par Affleck (voir le très bon Gone Baby Gone, 2007) peine à se démarquer.