Les yeux de sa mère
Mathieu Roussel (Nicolas Duvauchelle), un écrivain en manque d’inspiration, décide de s’infiltrer dans la vie de Lena Weber (Catherine Deneuve), présentatrice renommée du JT, afin de rédiger une biographie non autorisée. Il devient ainsi son assistant, tout en prenant soin de se rapprocher de sa fille, Maria Canalès (Géraldine Paihlas), célèbre danseuse étoile. Hantée par l’image de son fils contrainte d’abandonner quand elle était plus jeune, Maria décide de se mettre à sa recherche. Mathieu insiste pour l’aider dans sa requête. Bruno (Jean‑Baptiste Lafarge), âgé d’une vingtaine d’années, ne tarde pas à voir le cours de son existence bouleversé.
Un casting détonant pour un scénario dont la préoccupation centrée sur un fils à retrouver permet de creuser les liens complexes et parfois mortifères de la filiation. Les yeux de sa mère puise son âpreté dans l’œuvre d’Almodovar, son référent, sa matrice. D’ailleurs, la présence de Marisa Paredes l’atteste, autant que le comportement absent de Deneuve, fortement inspiré par le sien, dans Talons aiguilles.
Oscillant entre l’atmosphère pesante d’une investigation quasi criminelle et les embruns hors saison des berges bretonnes, le film de Thierry Klifa, dense et parfois confus dans l’orchestration de ses réseaux dramatiques, n’affecte pas seulement une danseuse professionnelle en mal de maternité. Sous couvert d’une instance rédemptrice, ce sont toutes les figures et fantômes matriciels qui sont mis à l’épreuve. Il est donc trop tard pour Lena pour récupérer sa fille. L’absence persistante d’une mère trop préoccupée par sa carrière contamine à son tour l’existence de Maria. Bruno, que la vérité intéresse à peine, émerge de ces rapports névrosés, comme une bouffée d’oxygène, juvénile et bientôt désenchanté.