Les griffes de la nuit
En 1984, le réalisateur Wes Craven, qui avait déjà fait ses preuves dans l'horreur avec La dernière maison sur la gauche et La colline a des yeux, livre un film fantastique d'une grande originalité, et donne du même coup naissance à l'un des croquemitaines les plus charismatiques du cinéma d'horreur : Freddy Krueger. Ce méchant au visage brûlé et doté de griffes de métal, qui s'immisce dans les rêves de ses victimes pour les tuer, se démarque grandement de ses homologues (Michael Myers dans la saga Halloween, Jason Voorhees dans la série des Vendredi 13). Bourré d'humour très noir, il n'est pas qu'un personnage à la présence fantomatique, mais un monstre terrifiant par son omniprésence. Dès que l'un des adolescents tombe de sommeil, il est immédiatement embarqué dans un cauchemar mêlant monde onirique et réalité, où Freddy règne en maître incontesté.
C'est en cela que Wes Craven réussit un tour de force, dans cette fusion/confusion de la réalité et du rêve. Ce gouffre de l'enfer happe irrémédiablement ces ados qui sont ici les seuls à détenir la vérité, leurs parents, impuissants et en rupture avec eux, ayant déposé les armes. Au passage, le modèle familial américain est égratigné : la jeunesse est seule, isolée, incomprise.
Mais au‑delà de ce léger sous‑texte, c'est surtout un génial film d'épouvante que livre Wes Craven, regorgeant de trouvailles en matière d'effets spéciaux (Freddy sortant du mur de la chambre de Nancy, endormie, le meurtre aérien et sanglant de Tina), et instaurant un climat anxiogène extrême. Ici, il est impossible de ne pas s'endormir, donc d'échapper à cette descente aux enfers.