Les femmes au balcon
Trois femmes, dans un appartement en pleine canicule à Marseille, fantasment sur leur voisin qui, un soir, les invite à prendre un verre…
Balance ton corps
Pour son second long métrage en tant que réalisatrice, la comédienne Noémie Merlant (Emmanuelle) s’amuse comme une folle à exploser façon puzzle la culture du viol et la masculinité toxique. Malheureusement, si le propos est on ne peut plus légitime, elle passe largement à côté de son film qu’elle aurait sans doute dû intituler Petits meurtres entre amies.
Honnêtement, la bande‑annonce faisait amplement saliver, presque autant que sa déco chinée chez Almodovar et traversée par un trio d’actrices au diapason (Souheila Yacoub, Sanda Codreanu, Noémie Merlant), concours d’exubérance, de baroque coloré et de regards expressifs à souhait. Il n’en demeure pas moins que ces Femmes au balcon, malgré son énergie débordante, se révèle être d’un profond ennui, s’épuisant dans le vide d’un scénario abscons et d'une réalisation sous Redbull.
Sans épiloguer sur une mise en place qui prend des plombes, le film rate à peu près tout ce qu’il entreprend, pourtant avec cœur. Mais cette vision de la sororité unie dans la galère de devoir se débarrasser d’un corps est très brouillonne. D’autant plus que le propos féministe est plus qu’appuyé et que les genres cinématographiques se mélangent sans véritable cohérence. Suspense, horreur, gore, burlesque, comédie, fantastique… On ne sait plus vraiment où l’on est.
Film au bord de la crise de nerfs
C’est clairement le (non) choix de la réalisatrice, pourquoi pas ? Un jaillissement d’idées. Une épilepsie permanente qui ne s'arrête jamais, hormis peut‑être sur le sentiment de culpabilité féminin face à la violence masculine, visualisé ici par des fantômes dont on ne sait pas très bien pourquoi ils ne s’adressent qu'au personnage le plus neutre du trio.
Étrangement, la scène qui fonctionne le mieux est sans doute la plus intime du film : celle où ces femmes se posent un peu et où le film prend le spectateur à témoin. En un plan‑séquence lors duquel l’actrice/réalisatrice Noémie Merlan retrouve son mari (harceleur), le film dénonce la culture du viol conjugal dans un geste cinématographique assez magistral. Malheureusement, non seulement la fin de la scène se vautre dans le vulgaire (quoiqu'assez drôle), mais surtout, ce moment suspendu devient vite iconoclaste pris dans la globalité du film.
À fond la forme
Bien maladroit et brouillon, le film peine à essayer de faire rire ou choquer, sans jamais y parvenir, à la manière de ce sexe coupé qui ne sert pas à grand‑chose ou ce chien au patronyme hilarant. Finalement tous deux bien inutiles.
Alors bien sûr, on voit aisément où la réalisatrice veut nous emmener et il y a quelque chose de touchant à voir ce female gaze cinématographique dans lequel les héroïnes se réapproprient leur corps telle des Femen, toute poitrine dehors. Mais en dehors de quelques moments assez forts (la scène chez le gynéco, la dernière séquence, la première scène) et quelques poitrines dénudées jaillissantes, il manque un fond tout aussi puissant que la forme.
On ne reproche pas au film ses intentions, juste la naïveté et la misandrie de son discours très caricatural qui le dessert. Un discours probablement salvateur pour beaucoup de victimes du patriarcat et des traumas qui en résultent, mais bien timide et peu audible dans le magma cinématographique.
Les femmes au balcon, les hommes au tison, mais sans trop de jubilation. Dommage.