Les bas-fonds
Pensionnaire dans un bouge sordide, Pepel (Jean Gabin) survit grâce à la petite délinquance. Surpris en pleine tentative de cambriolage, il sympathise finalement avec le baron ruiné (Louis Jouvet) de la luxueuse demeure et le convie même à s’installer dans son asile de laissés‑pour‑compte. Bien que Pepel ait une liaison avec l’épouse arriviste (Suzy Prim) de Kostileff (Vladimir Sokoloff), l’ignoble receleur et propriétaire des lieux, il ne rêve que de partir avec l’innocente Natacha (Junie Astor), la jeune sœur de sa maîtresse.
Entre le drame et la comédie sociale historiquement liée à son contexte (l'émergence du Front Populaire), Les bas‑fonds est l’adaptation de la pièce éponyme de Maxime Gorki (1902). Si Renoir choisit la sérénité des bords de la Marne plutôt que les courants froids de la Volga, il n’en reste pas moins que dans le havre miteux où les histoires des uns et des autres s’entrecroisent, l’humour et l’humeur tragique du dramaturge composent avec la tendresse de Renoir pour ses personnages.
De l’acteur raté et alcoolique (Robert le Vigan) à la touchante paire de frondeurs magnifiquement interprétée par Gabin et Jouvet, l’élan collectif transparaît malgré la marge. Ainsi, les déclassés jouent aux cartes, pleurent la disparition d’un pensionnaire et défendent l’un des leurs (séquence admirable du passage de l’individuel au corps collectif lors de la rixe finale entre Pepel et Kostileff).
Enfin, une certaine magie chaplinienne (Les temps modernes) imprègne la toute fin du film, lorsque Pepel et sa Natacha gagnent une petite route de campagne, vers un ailleurs (plus) optimiste. En 1957, Akira Kurosawa adaptera à son tour cette remarquable pièce.