par Carole Lépinay
06 octobre 2019 - 15h18

Les aventures de Rabbi Jacob

année
1973
Réalisateur
InterprètesLouis de Funès, Henri Guybet, Marcel Dalio, Claude Giraud, Suzy Delair, Miou-Miou
éditeur
genre
notes
critique
10
10
label
A

Tandis qu’il se rend au mariage de sa fille, Victor Pivert (Louis de Funès), riche industriel raciste et franchouillard, croise la route de Slimane (Claude Giraud), un leader politique recherché par de redoutables activistes arabes. Embarqué malgré lui dans cette dangereuse affaire, Pivert n’hésite pas à prendre l’identité d’un rabbin (Marcel Dalio), fraîchement arrivé de New York.


Parmi les films les plus diffusés à la télévision pendant les fêtes, on retrouve à coup sûr cette immense comédie populaire réalisée par le maître du genre, Gérard Oury (La grande vadrouille, Le Corniaud). Quarante‑six ans plus tard, les saillies racistes de Pivert, balancées à la vue d’un mariage mixte ou en découvrant la confession religieuse de son chauffeur Salomon (excellent Henri Guybet), ont toujours un effet jubilatoire. Délicieusement caricatural, Louis de Funès décuple les mimiques excessives empêtré dans sa soutane de rabbin, puis de plus en plus à l’aise avec ses papillotes, il improvise une chorégraphie survoltée (« Et maintenant, Rabbi Jacob, il va danser ! ») dans la rue des Rosiers (complètement reconstituée à Saint‑Denis par le décorateur Théobald Meurisse avec des Maghrébins locaux tous grimés en Juifs pour la figuration). Bref, l’acteur incarne, de loin, le cas d’imposture le plus désopilant du cinéma français.


Contemporain de la guerre du Kippour, Les aventures (rocambolesques) de Rabbi Jacob fait un tabac malgré un climat tendu lors de sa sortie en salles en 1973 (7 millions 300 000 entrées). Depuis, la comédie culte continue à nous dérider grâce à son humour décomplexé. Nostalgie.

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4k
cover
Tous publics
Prix : 24,99 €
disponibilité
05/09/2019
image
1 UHD-66 + 1 BD-50 + 1 DVD-9, 95', toutes zones
1.66
UHD 2 160p (HEVC)
SDR
16/9
bande-son
Français DTS-HD Master Audio 1.0
Français Audiodescription
sous-titres
Français pour sourds et malentendants
7
10
image

La plus belle version du film jamais vue nouvellement restaurée, mais sans doute pas la dernière. Explications. Simple SDR, ce master 4K présente évidemment des qualités inédites, à savoir des couleurs largement boostées (il n'y a qu'à voir le vert pétant du fameux chewing‑gum), une netteté grandement améliorée la plupart du temps (reste quelques plans flous et parfois un peu de fourmillement), de beaux gros plans presque tournés d'hier et des teintes chair bien équilibrées.

 

Mais force est de constater qu'une marge de progression demeure, la faute à un SDR qui se voit et nous fait regretter la puissance de frappe d'un HDR, son relief accru, sa brillance et sa dynamique majestueuses. Le naturel a clairement été privilégié au détriment du vernis. On aurait juste bien aimé un peu des deux. Reste que cette copie dénuée de tout défaut est déjà une belle victoire.  

7
10
son

Brillantissime ouverture dans les rues de New York sur la musique trépidante de Vladimir Cosma… Le cœur léger, le sourire aux lèvres, on ouvre tous nos sens aux notes légères et pétillantes inspirées par le folklore roumain cher à Cosma. Évidemment, le temps fort de la danse de Rabbi Jacob est à savourer bien plus que tout autre passage ‑même en mono‑, mais les dialogues ne souffrent d'aucune baisse de rythme, ni de drôlerie d'ailleurs. Allez, des aigus encore un peu agressifs, trois fois rien… Et puis un simple mono qui ne peut pas se faire plus gros que le bœuf… Mais c'est le mix originel.

8
10
bonus
- Souvenirs de tournage par Bernard Stora (inédit) (29')
- Il était une fois… les aventures de Rabbi Jacob (inédit) (52')
- La joie de faire rire (28')
- Louis de Funès, comique sérieux (11')
- La musique complice (12')
- Un contexte particulier (8')
- Blu-Ray du film et DVD bonus
- Livret exclusif de 80 pages par Gilles Grisard et bande-annonce

Le réalisateur et scénariste Bernard Stora, qui a débuté comme stagiaire sur le film « perdu » d'Henri‑Georges Clouzot L'enfer, livre ses souvenirs sur le film et son époque dans un entretien inédit. Il aborde bien sûr le contexte israélo‑palestinien du moment, le tournage de la danse de Rabbi Jacob dans les rues de Saint‑Denis avec des figurants exclusivement maghrébins déguisés en Juifs (deux prises seulement, toute l'équipe, dont le réalisateur, a découvert le résultat des répétitions au moment de tourner), mais aussi le sentiment qui animait alors l'équipe du film, cette sensation de faire quelque chose « de bien », le sens du spectacle de Louis de Funès, le rythme inouï du film (le décor de la voiture qui plonge dans l'étang fut trouvé un mois seulement avant la sortie du film en salles, complètement fou…). Il révèle aussi une anecdote savoureuse au sujet du chewing‑gum vert chlorophylle : en fait, de la pâte à pain au levain qui gonfla tout un week‑end avant le tournage et qui finit par littéralement envahir le studio. Nettoyage obligatoire, deux jours de retard, puis reprise des opérations mais sans levain cette fois. Henri Guybet avoue un plus loin toute son admiration pour de Funès et sa totale surprise quand il découvrit que celui qui se démenait aux répétitions dans le magma vert encuvé n'était autre que le comique en personne…

 

L'autre document inédit de 52 minutes donne la parole à l'historien Benjamin Stora, à la fille de Gérard Oury et coscénariste Danièle Thompson, au rabbin Josy Eisenberg (coscénariste du film). Il revient encore une fois sur le contexte historique du film (quelques doublons d'ailleurs au niveau des anecdotes), sur les racines juives de Gérard Oury et son passage aux films comiques grâce à de Funès, les qualités de l'humour juif au cinéma, ou encore la douce propagande du film pour davantage de tolérance. À ce sujet, Louis de Funès, strictement inculte en matière de religions (de l'aveu même du rabbin Josy Eisenberg) confesse que le film lui a permis d'être moins intolérant avec l'Autre, de se « décrasser l'âme ». Fort.

 

Les autres modules sont parfois redondants mais se visitent avec plaisir : encore des souvenirs de Danièle Thompson, des témoignages sur la science comique de Louis de Funès, la fabuleuse musique de Vladimir Cosma qui sent bon ses racines roumaines et le folklore local, ou encore la guerre du Kippour, déclarée sept jours avant la sortie du film. Pas de quoi enrayer la machine lancée par une équipe surmotivée.

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