28 mars 2025 - 10h00

Le sens des choses

année
2025
Créateurs
InterprètesElsa Guedj, Solal Bouloudnine, Éric Elmosnino, Noémie Lvovsky, Manu Payet
plateforme
genre
disponibilité
28/03/2025
notes
critique
6.5
10
A
© Raoul Gilibert
© Raoul Gilibert
© Raoul Gilibert
© Raoul Gilibert
© Raoul Gilibert
© Raoul Gilibert
© Raoul Gilibert
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À 28 ans, Léa (Elsa Guedj) entame un métier pas comme les autres : celui de rabbin dans une synagogue à Strasbourg. Une vocation singulière faisant d'elle un oiseau rare, mais qui est très peu appréciée par son père laïque (Éric Elmosnino) chez qui elle habite encore. Faisant ses premiers pas et ayant la responsabilité de chapeauter ses premiers événements (mariage, enterrement, conversion…), elle est rapidement confrontée à des interrogations vives et complexes de la part des fidèles, l'obligeant à trouver les mots justes face à des interrogations qui touchent à la foi ou au sens de la vie.

 

Le portrait d'une jeune femme s'engageant pleinement dans sa foi

Révélé il y a quelques années avec sa satire politique européenne Parlement, Noé Debré avait continué de faire rire l'an passé avec sa relecture de Zorro, avec Jean Dujardin. Coécrite une nouvelle fois avec Benjamin Charbit (scénariste de Bac Nord), sa nouvelle série Le sens des choses, diffusée sur Max, change sensiblement de registre en venant interroger la question religieuse dans 8 épisodes où se mêlent humour et émotion. Le point de départ de la série vient de la rabbin libérale française Delphine Horvilleur, et tout particulièrement de son essai Vivre avec nos morts qui évoquait la question du deuil et de l'accompagnement pour ceux qui restent. Il ne s'agit pas d'un classique biopic, la personne d'Horvilleur et ses réflexions ont plutôt servi de base pour faire naître le personnage de Léa, une jeune femme à contre‑courant, s'engageant pleinement dans sa foi et cherchant à se placer au service des autres dans les moments les plus intenses de l'existence, de la naissance à la mort.

 

© Raoul Gilibert

© Raoul Gilibert

 

On ne peut d'ailleurs que saluer la performance d'Elsa Guedj, qui incarne avec beaucoup de justesse un personnage aussi complexe et sensible, cherchant à trouver sa légitimité et sa voix dans le rôle qu'elle commence à tenir pour une communauté, tout en restant simplement une jeune adulte de 28 ans rongée par le syndrome de l'imposteur et n'ayant pas spécialement su encore donner un cours clair à sa vie. Le regard franc et les sourires en coin d'Elsa Guedj correspondent parfaitement à ce personnage qui refuse un quelconque rôle d'autorité, préférant celui de guide lucide sur le chemin parfois accidenté de la foi.

 

De premiers épisodes qui patinent

Son interprétation, entre gravité et maladresse selon les situations, est d'ailleurs ce qui permet à la série de garder le cap pour sa première moitié, quand le spectateur peine à comprendre où celle‑ci nous emmène. Avec une structure qui évoque des séries télévisées à épisodes, façon polar ou Dr House, notre jeune rabbin (ou rabbine, « c'est comme vous préférez », répète‑t‑elle sans cesse) est confrontée au début de chaque épisode à un nouveau problème (une circoncision qui fait débat, un jeune garçon qui ne veut pas faire sa bar mitzvah…) qu'elle a pour tâche d'essayer de démêler en une petite demi‑heure.

 

Un cadre qui enferme la série dans une série de discussions répétitives : entre explications de textes souvent didactiques sur la religion juive et tentatives d'humour qui tombent dans la facilité (voir ce deuxième épisode raté ‑qui dépeint un jeune adolescent en conflit avec son père car il refuse de fêter sa bar mitzvah, trop préoccupé par le réchauffement climatique‑ et qui s'entête à rejouer tous les clichés de ce genre de situation avec la subtilité d'une publicité pour un fournisseur d'énergie), Le sens des choses semble presque trop inquiet à l'idée de perdre son public avec ses questions de foi et de religion, préférant faire le pitre avec un Manu Payet assez caricatural. C'est le risque d'un tel mélange entre humour et drame : l'impression d'être à la fois trop sérieux tout en restant superficiel.

 

© Raoul Gilibert

© Raoul Gilibert

 

Une belle galerie de personnages

Heureusement, la situation se décante au fur et à mesure que la série avance, laissant place à une galerie de personnages dont les traits s'épaississent progressivement : le frère plein d'humour qui déborde d'amour pour sa sœur, et puis le père évidemment, brillamment joué par Éric Elmosnino, ce psychiatre farouchement opposé à l'ordination de sa fille, dont la mauvaise foi cache des névroses encore à vif. On s'attache petit à petit à l'énergie parfois électrique qui court dans ce petit noyau familial, véritable cœur de la série, et qui raconte en creux la difficulté et la nécessité d'aller vers l'autre, grâce à des dialogues souvent justes et touchants.

 

Comment raconter, comment transmettre, comment se comprendre… La série n'entend pas apporter de réponses toutes faites aux questions très lourdes qu'elle soulève. Au contraire, elle préfère laisser la place à différentes voix, à faire entendre les doutes, et à remettre occasionnellement en question la place que peut prendre la foi aujourd'hui, particulièrement à notre époque. Loin d'être prosélyte (malgré son petit côté « judaïsme express pour goy », qui a son charme malgré tout !), Le sens des choses essaie de faire coexister le sacré avec le quotidien, et de montrer ce que certains rites millénaires peuvent encore apporter aujourd'hui dans un monde en quête de sens. Bien sûr, certaines de ses réflexions restent prudentes, en particulier l'opposition entre le judaïsme orthodoxe et libéral, évoqué ici dans une séquence houleuse de débat entre deux personnages, mais visiblement laissée de côté pour une potentielle saison 2. Malgré tout, on traverse finalement avec curiosité les 8 épisodes de cette jolie série, qui a le mérite d'apporter un regard doux et bienveillant sur un sujet qui aurait pu être un véritable nid de guêpes.

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