Le comte de Monte‑Cristo
Victime d’un complot, le jeune Edmond Dantès est arrêté le jour de son mariage pour un crime qu’il n’a pas commis. Après quatorze ans de prison, il parvient à s’évader. Sous l’identité du comte de Monte‑Cristo, il revient pour se venger de ceux qui l'ont trahi.
Le comte est bon
Les deux scénaristes derrière le récent diptyque de Martin Bourboulon consacré aux Trois Mousquetaires (D'Artagnan, Milady), Matthieu Delaporte et Alexandre De La Patellière, adaptent cette fois un autre classique d’Alexandre Dumas : Le comte de Monte‑Cristo. Autant le dire tout de suite, les deux hommes n’ont pas raté leur cible. Le film fonctionne plutôt bien et ne trahit en rien l’essence du roman tout en le simplifiant à la truelle.
Cette fois, les deux hommes, qui sont aussi passés derrière la caméra, ont fait appel non plus à François Civil, mais à son grand rival et ami parmi les acteurs de sa génération : Pierre Niney. L’ex‑pensionnaire de la Comédie Française (et cela a son importante dans son jeu et le charisme du héros) imprime de sa marque le personnage le plus romanesque de la littérature française, gommant au passage sa fantaisie, inutile ici.
Bien sûr, les réalisateurs (et auteurs) du Prénom n’ont jamais vraiment brillé par leur patte de réalisateurs. Bien sûr, ils abusent des plans de drones et adorent les musiques redondantes. Bien sûr, ils se complaisent à essayer de faire de « jolis plans », comme le travelling au‑dessus des cellules rythmé par la question glaçante : est‑il vivant ? Bien sûr, il y aurait beaucoup à dire sur cette nouvelle version de Monte‑Cristo. Mais on se prend au jeu et on ne voit pas les 3 heures de film passer, même si pourtant on connaît l’histoire pour l’avoir déjà vue et revue mille fois sur les écrans. On sait qu’il n’y aura que peu de duels ou d’action (d’ailleurs ici très mal filmée) contrairement aux Trois Mousquetaires, mais cette vengeance implacable et cette détermination sont toujours aussi fascinantes. Surtout quand sa mécanique (qui s’enraie un peu, mais chuuuuut) est si bien rendue par le scénario. On ne peut que souligner le travail d’orfèvre. Ils connaissent leur Dumas sur le bout des doigts.
Ni oui, Niney
Outre Pierre Niney qui excelle dans un rôle dont néanmoins il n’a clairement pas l’âge (autant lui demander de jouer Jean Valjean), le casting du film est pour beaucoup dans sa réussite. Bien évidemment, les costumes et les somptueux décors aussi, mais que ce soit Laurent Lafitte, Bastien Bouillon ou Patrick Mille, ils sont tous géniaux. Ils ne cabotinent pas trop (on est loin de la composition de Romain Duris en Aramis) et offrent une épaisseur inespérée à chacun de leur personnage. Tous au diapason de Pierre Nieney, qu’on a rarement vu aussi mature.
Ce n’est pourtant pas sa composition que l’on retiendra. Aussi talentueux soit‑il, il se fait littéralement voler la vedette par Anamaria Vartolomei, dont on regrette qu’elle n’ait pas plus de scènes. Elle crève l’écran et les cœurs dans le rôle d’Haydée.
Anaïs Demoustier n’est pas en reste dans un rôle qui, sur le papier, n’était pas gagné. Elle joue Mercedes, l’ex‑fiancée de Dantès, qui est à vrai dire plutôt un faire‑valoir/point de départ dans cette sublime histoire de vengeance. L’intensité de son jeu offre à son personnage une complexité et par ricochet un romanesque assez incroyable.
À elles seules, les deux actrices aèrent une histoire très dense et une mise en scène assez plate, et c’est tant mieux. Dumas féminisé et quelque peu trahi, mais on s’en réjouit.