L'année du dragon
Il fut, au moment de Voyage au bout de l’enfer en 1978, le wonderboy le plus courtisé de Hollywood. Deux ans plus tard, l’échec retentissant de La porte du Paradis fit de lui un pestiféré. Après une longue traversée du désert, Michael Cimino se voit offrir par le producteur Dino de Laurentiis la possibilité de revenir enfin au cinéma.
Adapté d’un roman de Robert Daley et co‑écrit par Oliver Stone, L’année du dragon cale son pas sur un vétéran du Vietnam devenu flic, Stanley White, qui débarque à Chinatown, New York, avec la ferme intention de nettoyer la zone des triades et de toute forme de corruption.
Au fond, L’année du dragon constitue le dernier volet d’une trilogie débutée en 1978, tant le personnage qu’interprète magnifiquement Mickey Rourke (cliquez pour accéder à son interview) ressemble au Robert De Niro de Voyage, une sorte de cousin lointain qui n’aurait pas fait le deuil de la défaite au Vietnam et que la musique de David Mansfield teinte toujours d’une même mélancolie.
Car Stanley White est un personnage ciminien en diable, un héros idéaliste, un homme en quête d’absolu, qui fantasme une Amérique qui n’existe pas, ou plus, et se retrouve confronté à une réalité qui lui déplaît. Les conflits interethniques, la disparition du grand rêve communautaire, et ce drapeau qu’il contemple comme le Capitaine Achab traquant à l’horizon une baleine blanche qui se dérobe sans cesse. « Tu poursuis quelque chose qui n’existe pas », lui dit très justement son collègue au milieu du film.
Tourné intègrement à Los Angeles, L’année du dragon fut, au moment de sa sortie, sujet à des controverses idiotes, puisque certains ont pris le combat moral qui fait rage dans l’esprit de White comme le manifeste raciste de Cimino lui‑même. Trente ans plus tard, l’histoire s’est remise à l’endroit et le quatrième film de Cimino (cliquez pour accéder à notre Cinécult') brille comme l’un des diamants noirs du cinéma américain. Une merveille.