La vie domestique
Juliette a emménagé depuis peu dans une banlieue résidentielle de Seine‑et‑Marne avec son mari et leurs deux enfants. Prisonnière du quotidien comme la plupart de ses voisines, elle espère une bouée de sauvetage, un poste dans une maison d’édition qu’un ami pourrait l’aider à décrocher. Elle et son mari décident d’inviter à dîner Betty et Marianne, deux voisines, ainsi que leurs époux, alors que la police recherche activement une fillette enlevée.
Dépeindre le quotidien létal d’une vie bourgeoise peut se faire de plusieurs manières. On peut opter pour la façon Desperate Housewives ‑auquel La vie domestique fait d’ailleurs quelques clins d’œil‑ en agrémentant son constat mortifère d’une bonne louche d’humour noir.
Isabelle Czajka, la réalisatrice de La vie domestique, s’est refusé cette facilité. Elle veut décrire, plein cadre, l'asphyxie psychique de trois femmes, l'agonie de leurs espérances alors qu’elles n’ont que la quarantaine. Prendre ce chemin périlleux exigeait des actrices de haut niveau ‑elles sont là (épatantes Emmanuelle Devos et Julie Ferrier)‑ et un délicat travail d’orfèvrerie dans la mise en scène et les dialogues. Eux, sont aux abonnés absents. Au lieu du tact raffiné qu’exigeait l’approche choisie, Isabelle Czajka sort la masse et les gros canons.
La masse avec des dialogues qui, au lieu de suggérer ou d’insinuer, martèlent le propos. Les gros canons avec ces plans hautement « signifiants » (la visite du centre commercial) déclamant l’aliénation de ces femmes. Et comme si la caricature n’était pas complète, Isabelle Czajka décide de sortir le gros rouleau à peinture et transforme tout ce qui entoure ses héroïnes en chienlit : les maris sont tous des crétins paresseux et égocentriques, les enfants des vauriens bruyants, les seconds rôles des lourdauds finis… Pour être bien comprise, Isabelle Czajka a choisi la lourdeur. Et a tué son film.