La momie
Aux vues de cette Momie 2017, il n'est pas évident de se rappeler que c'est au sein du studio Universal que sont nés la plupart des mythes du cinéma fantastique, de Dracula à la Momie en passant par Frankenstein et le Loup‑Garou. Depuis toujours, c'est LE terreau de la science‑fiction et du fantastique au cinéma, de la terreur gothique, de la peur et de l’horreur.
Tout commence en 1923 et 1925, quand Lon Chaney joue coup sur coup dans Notre‑Dame de Paris et Le fantôme de l’opéra. Le succès est au rendez‑vous et Carl Laemmle, le fondateur d'Universal, se lance dans l’adaptation à l’écran du roman Dracula de Bram Stocker avec Bela Lugosi. Le film fait fureur : des spectateurs s’évanouissent, d’autres quittent la salle en hurlant. Le film d’horreur est né. Suivront les adaptations de la plupart des grandes figures de la littérature fantastique, c'est le premier cycle cinématographique de films fantastiques des années 30, les « Universal Monsters ».
En 1932, c'est au tour de la Momie. Boris Karloff, qui incarne l'année précédente la créature couturée et boulonnée du docteur Frankenstein, réapparaît sous les bandelettes de la momie Im‑Ho‑Tep dans le film de l'ancien chef‑opérateur allemand Karl Freund. Après une production intense, le genre tourne quelques années plus tard à la parodie. On en arrive à notre Momie 2017 signée Alex Kurtzman (producteur des séries Fringe et Hawaii Five‑0), portée par un Tom Cruise qui aurait peut‑être dû opter pour le remake de l'Homme invisible (une série de reboots est d'ailleurs en préparation chez Universal avec prochainement La fiancée de Frankenstein et, donc, L’homme invisible).
On l'aura compris, une momie vengeresse est de retour (la Française Sofia Boutella), bien décidée à assouvir ses viles pulsions dévastatrices et déverser sa haine sur le monde. Elle tombe sur un pilleur de trésors antiques (Tom Cruise), son fidèle acolyte (Jake Johnson) et la conquête d'un soir du premier, évidemment spécialiste de l'ancienne Égypte (Annabelle Wallis). Et c'est parti pour les transferts de l'esprit des uns dans le corps des autres, suivis d'un chapelet de combats dantesques gavés d'effets spéciaux solides mais loin d'être novateurs qui nous font presque regretter le génie des inventeurs révolutionnaires de la grande époque (hommage à Jack Pierce, John P. Fulton et les autres…).
Au final, cette Momie où tout le monde est intercheangable n'a aucune vision hormis le vague espoir de faire rire en mixant comédie et fantastique, et prouve que ce qui avait fonctionné pour Mission impossible : protocole fantôme (infusé par Brad Bird à la sauce cartoon) tombe ici complètement à plat. Loin de renouveler le mythe, ce nouvel opus l'enterre sans doute pour quelques longues années.