La grève
Dans la Russie tsariste de 1912, les ouvriers doivent faire face à des conditions de travail éprouvantes et à des salaires de misère. Dans l’une des grandes usines du pays, le mécontentement gronde et le suicide d’un agent, accusé à tort d’avoir dérobé un micromètre, met le feu aux poudres. Colère, grève et manifestations des ouvriers dans les rues. Désemparée mais opposée à la moindre négociation, la direction décide de faire appel aux forces de l’ordre afin de mater la révolte de ses employés.
Premier grand film du maître formaliste russe réalisé en 1925, La grève fit l’effet d’une bombe dans un cinéma russe encore inféodé à l’académisme et à l’influence du théâtre. À 26 ans, Eisenstein atomise tous les principes d’un cinéma traditionnel, qu’il qualifie de bourgeois, et filme du point de vue des prolétaires : ici, pas de héros individualisés mais une masse héroïque, une mise en scène coup-de-poing qui privilégie la mise en rapport violente des images entre elles (le massacre des ouvriers montés avec les images d’un bœuf qu’on égorge) et un tournage en extérieur (le film fut tourné dans une véritable usine).
La grève inaugure l’âge d’or du cinéma soviétique mais ne sera vraiment diffusé qu’après le deuxième film d’Eisenstein, Le cuirassé Potemkine, réalisé quelques mois plus tard.