La fille du RER
On se souvient de ce fait divers du 9 juillet 2004 qui avait ému toute la France, lorsqu’une jeune fille non juive, Marie-Léonie Leblanc, avait prétendu avoir été victime d’une violente agression antisémite sur la ligne du RER D, tandis qu’elle voyageait avec son bébé. La presse, les hommes politiques et de nombreuses associations montaient alors au créneau et dénonçaient l’affaire. Quelques jours plus tard, la jeune femme avouait son mensonge et faisait des excuses publiques.
En 2008, André Téchiné s’empare de cette incroyable histoire et, à partir de la pièce de Jean-Marie Besset (RER), tourne la fiction d'un événement qui n’a pas eu lieu. Construit en deux parties (les circonstances et les conséquences), La fille du RER commence par exposer le passé et les trajectoires de tous ces personnages qui seront impliqués dans l’action, avant de filmer la mise en scène de cette fausse agression et ses répercussions psychologiques.
Jeanne (Émilie Dequenne), la future mythomane pour qui mentir c’est enfin exister, constitue le vortex de ce film étonnant. Flanquée d’une vie ordinaire (mère aimante, pavillon de banlieue, en recherche d’emploi), Jeanne rencontre un jour Franck (Nicolas Duvauchelle). Après l’idylle survient le drame qui conduira Jeanne à sa mystification.
La force du film de Téchiné tient dans le fait qu’il ne cherche pas à remplir les trous d’une histoire abracadabrante mais, à travers elle, à s’interroger sur la fragilité de l’identité humaine. Une authentique réussite.