La baie sanglante
Lorsqu’il tourne La baie sanglante en 1971, Mario Bava est en fin de carrière (il mourra en 1980) et a déjà signé une œuvre monumentale du cinéma italien des années 1960 et 1970, alternant films fantastiques (Le masque du démon), thrillers, péplums et une flopée de gialli, genre phare dont il fut d’ailleurs l’inventeur avec Six femmes pour l’assassin en 1964.
Avec La baie sanglante (Réactions en chaîne en italien), Bava passe de cette esthétique raffinée qui a fait sa réputation (la formidable séquence d’ouverture aux tons chauds hérités du cinéma gothique et le meurtre d’une vieille comtesse) aux prémisses d’un genre -le slasher- dont le cinéma américain reprendra plus tard le flambeau (Vendredi 13 date de 1980).
Ici, le scénario est réduit au strict minimum : une série de treize meurtres se déroule dans l’atmosphère humide d’une baie. Soit l’occasion pour Bava d’un exercice formel éblouissant où les individus se mêlent à la flore et aux insectes, et intègrent cette grande chaîne de la prédation et de la mort.
La dernière séquence du film enfonce le clou d’une vision particulièrement désabusée et pessimiste de l’humanité que Bava et une bande de gamins regardent s’étriper, à l’image de cet entomologiste fasciné par les scarabées. Une merveille qui contient aussi en germe L’île de l’épouvante, le film qu’il tournera l’année suivante.