L'héritage de la chair
Le titre original du film ‑Pinky‑ donne une indication précieuse sur l’enjeu de ce film réalisé par Elia Kazan, après le départ de John Ford, en 1949. Pinky (Jeanne Crain) est une femme de race noire mais à la peau blanche. Elle se refuse au médecin blanc qui la courtise et part dans une petite ville du Sud des États‑Unis pour y rejoindre sa grand‑mère noire. Là, elle fait la connaissance de Miss Em, une vieille femme blanche qui va en faire son héritière. De son côté, l’homme, amoureux et têtu, n’a pas dit son dernier mot.
Kazan aborde ici, et de front, un sujet de société peu présent dans le cinéma hollywoodien, le racisme, et plus précisément la question du métissage, de la même façon qu’il s’était attaqué l’année précédente à l’antisémitisme avec le formidable Mur invisible.
Émouvant, subtil, parfaitement interprété, ce drame sur le racisme mérite vraiment le détour. Rappelons enfin que Kazan fut, en 1946, le fondateur de l’Actor’s Studio, incroyable pépinière de talents (Brando, Newman, Quinn, Clift…) où étaient enseignées les méthodes du dramaturge Stanislawski. Cet héritage théâtral marque encore les films qu’il réalisa dans les années 1940 (Boomerang), mais s’estompe ici.