L'aube du monde
Quelque part dans le sud de l’Irak, entre le Tigre et l’Euphrate. Mastour et Zahra ont grandi ensemble, dans une campagne dépouillée faite de marais et de roseaux. Après leur mariage, la guerre du Golfe éclate, et Mastour est appelé au combat. Sur le champ de bataille, il fraternise avec Riad, un soldat bagdadi. Mais Mastour est grièvement blessé par une mine antipersonnelle. Avant son dernier souffle, il fait promettre à son ami de s’occuper de son épouse…
Alignant les beaux cadres, alternant les valeurs de plans et usant de métaphores visuelles pour livrer une œuvre poétique sur l’irruption de la guerre au sein d'une nature imperturbable, le réalisateur et scénariste Abbas Fahdel oublie hélas l’essentiel : insuffler de la vie à ses personnages. L’idée de s’intéresser au destin des Maadans, ces Arabes des marais méprisés par une partie de la communauté urbaine irakienne et par Saddam Hussein, était louable et judicieuse, car cette « petite » histoire permet d’illustrer la grande, celle d’un pays sous la coupe d’un dictateur dont on ne voit ici le visage que par le biais de tracts de guerre tombant du ciel.
C’est d’ailleurs cette partie du film que le metteur en scène réussit le mieux : illustrer la menace de la guerre par son négatif, ne montrer que son ombre planant sur un pays dénudé et dans le dénuement, rappeler sa présence par les cadavres qui parsèment le désert, quelques bruits d’hélicoptères menaçants. Mais quand il s’agit de faire parler les hommes et les femmes victimes de ces conflits sans fin, Abbas Fahdel n’est pas à la hauteur de ses ambitions.
Pour son premier long métrage, Fahdel a le mérite de livrer une histoire intelligente et sensible, faisant preuve d’une réelle volonté de « faire du cinéma », mais ne parvient pas à y adjoindre émotion et incarnation pour sauver son film de l'austérité.