L'armée des ombres
« Mauvais souvenirs, soyez aussi les bienvenus, vous êtes ma jeunesse lointaine », indique un carton au début de L'armée des ombres, le chef‑d'œuvre de Jean‑Pierre Melville. Ce n'est qu'en 1969 que l'homme aux lunettes noires et au stetson vissé sur la tête réalise sans doute le film qui lui tient le plus à cœur. Après s'être imposé dans le polar (Le doulos, Le samouraï, Le deuxième souffle), Melville entreprend de filmer une période qu'il a bien connue, puisqu'il fut lui‑même résistant.
Un film majeur d'une grande pudeur
« L'armée des ombres », soit ces milliers d'hommes et de femmes anonymes qui, pendant l'Occupation allemande, ont tenté de résister clandestinement. Ce que montre le film de Melville à travers une poignée d'entre eux (Ventura, Signoret, Crauchet…), c'est un quotidien où le moindre des gestes peut vous conduire en cellule ou dans le couloir de la mort. Ici, la prise de risque est maximale, et pourtant, le résultat est souvent minime : passer un poste de radio, donner à manger à quelqu'un… Une série d'actes anodins qui a permis à la Résistance de s'organiser.
Film d'une grande pudeur et d'une intelligence de mise en scène incroyable, L'armée des ombres, proposé ici en version restaurée de toute beauté, est tout simplement indispensable.