Knock
Knock, ancien voyou reconverti par hasard à la médecine, reprend le cabinet médical du village de Saint‑Maurice. Le médecin, qui s’acoquine avec le pharmacien du village, est déterminé à faire fortune en inventant toutes sortes de maladies imaginaires à ses nouveaux concitoyens. Bien qu’en butte avec le curé local, vexé par son dédain, Knock fait fortune. Mais l’escroc n’a pas prévu un coup de cœur pour une jolie jeune fille du village, ni l’arrivée d’un gredin qu’il avait côtoyé dans sa première vie.
Revisiter un classique n’est pas chose aisée mais s’avère souvent une démarche passionnante. Quoi de mieux qu’une relecture tardive (la pièce de Jules Romain date de 1923, le film avec Louis Jouvet de 1951) pour démontrer la modernité d’un propos ? Quoi de plus créatif qu’une relecture libre pour élargir un thème classique ?
Dans son audacieuse entreprise, la réalisatrice et scénariste Lorraine Levy a bénéficié de nombreux atouts : un joli casting de comédiens énergiques, une photographie et une lumière de grande qualité ainsi qu’une star inattendue. Knock, campé par le toujours tonique Omar Sy, est un personnage ultramoderne au sens où sa couleur de peau est, enfin, devenue donnée négligeable. Nul personnage ne l’évoque dans le film à aucun moment et, il faut le dire, cette disparition fait un bien fou.
Mais revisiter ou moderniser un classique exige aussi une mécanique de précision dans l’écriture. Et c’est là où le bât blesse. La réalisatrice et scénariste chasse en effet sur deux tableaux irréconciliables. Si son Knock reste un escroc avide qui sait faire fructifier les maladies imaginaires de ses patients ‑le fond de la pièce et du film original‑ il devient aussi ici une force solaire qui illumine le quotidien de ceux qu’il s’obstine pourtant à appeler ses « clients ». Deux faces totalement contradictoires, cupidité et amour, pour tout dire incohérentes, qui expliquent peut‑être les problèmes de rythme du récit (interminable prologue) ainsi que les incertitudes du jeu d’Omar Sy. Le talentueux comédien a de manière perceptible du mal à appréhender son personnage dans la globalité malgré quelques séquences éclatantes.
Autre problème d’écriture : les seconds rôles. Bien que servis par des acteurs compétents (Alex Lutz, Ana Girardot, Sabine Azéma, Hélène Vincent), ces personnages sont des figures unidimensionnelles, simples rouages narratifs qui ne suscitent d’autre attachement que purement décoratif à l’exception peut‑être de Christian Hecq, savoureux facteur soiffard. Ces gros soucis d’écriture ne trouvent pas meilleure illustration que la scène de fin, inracontable pour cause de spoiler. Un final censé précipiter l’alchimie mise en place par Knock à Saint‑Maurice mais qui, à coups de dialogues laborieux d’une intensité dramatique mal tenue et de gags visuels totalement hors sujet, s’effondre sans susciter l’émotion recherchée.