Killing Gentleman
Chicago, à l’approche de Noël. La douce Kate Frazier (l’Écossaise Kelly Macdonald, qui jouait la femme de Josh Brolin dans No Country for Old Men) vient de refaire sa vie. Nouveau job, nouvel appartement, pas d’amis ni de famille. Elle sympathise simplement avec sa collègue Diane (Darlene Hunt), mais ne pipe pas mot sur sa vie antérieure. Quelle est l’origine de son coquard ? Une partie de hockey qui a mal tourné, comme elle le raconte à Diane ? Un soir, après son travail, alors qu’elle regarde vers les toits, elle aperçoit un homme qui tente de se suicider. Elle pousse un cri, l’homme glisse en arrière puis disparaît. Cet individu dont elle n’a pas pu distinguer le visage connaît le sien. C’est Frank Logan, un tueur à gages (Michael Keaton, devant et derrière la caméra) qui l’a aperçue pour la première fois alors qu’il s’apprêtait à exécuter un contrat. Elle lui est apparue à travers une fenêtre, tel un ange, mimant une statue du Christ qu’elle avait vue dans une église du quartier. Les deux êtres vont bientôt se retrouver, s’apprivoiser et veiller l’un sur l’autre, comme deux anges gardiens…
Première réalisation du trop rare Michael Keaton (inoubliable Beetlejuice et Batman), Killing Gentleman, doté d’un budget minimaliste de 5 millions de dollars, séduit par sa forme plus que par son fond. Le metteur en scène fait montre d’une aptitude à la direction d’acteurs (excellente Kelly Macdonald) et au cadrage, usant à merveille du format Cinémascope. Baignant dans une ambiance crépusculaire étouffée par la neige, les différents lieux de tournage de Chicago révèlent tout leur potentiel, Keaton soignant ses scènes comme autant de tableaux (voir la séquence dans l’Église pour s’en convaincre).
Mais l’enrobage, aussi alléchant soit il, ne suffit pas pour mettre en boîte une histoire efficace. Pour ces portraits d’âmes en peine, cherchant une rédemption ou une issue de secours chacune à leur manière, Michael Keaton préfère communiquer via les regards de ses acteurs et les situations plutôt que par les dialogues. Mais il manque ce petit quelque chose pour être connecté avec les personnages, la caméra se tenant trop à l’écart des visages pour traduire clairement leurs états d’âme et leurs meurtrissures. La relation entre Kate et Frank Logan souffre des mêmes défauts : anges gardiens veillant l'un sur l'autre, ils entretiennent une histoire d’amour platonique dont on ne ressent jamais l’indispensabilité. Un premier essai formellement surprenant et prometteur, mais inabouti dans son propos et manquant un peu de chair.