Jamais de la vie
En une quinzaine de films, Pierre Jolivet a su faire entendre, au sein d’un cinéma hexagonal peu intéressé par le réel, une petite musique sociale bien à lui. Après Ma petite entreprise, Zim and Co, ou encore Fred, Jolivet continue de décrire avec Jamais de la vie la lente décrépitude d’une société française, rongée par le chômage, la pauvreté, la misère sociale, urbanistique et par cette intégration qui ne prend pas.
Franck, l’agent de sécurité du film qu’incarne Olivier Gourmet, porte (un poil trop) sur ses épaules le poids de cette France à bout de course. À 52 ans, cet ancien syndicaliste licencié pour des raisons obscures se contente de ce boulot tristounet qu’il effectue consciencieusement dans un centre commercial de banlieue. Il le sait, l’essentiel de sa vie est derrière lui et la retraite qu’il touchera un jour lui permettra à peine de se loger.
Célibataire, alcoolique, Franck entretient des relations minimales avec le monde extérieur. Seul Titou, son collègue de jour, et sa conseillère pour l’emploi (Valérie Bonneton), soulagent parfois sa solitude. Rien ne semble devoir enrayer cette monotonie jusqu’au jour où d’étranges allées et venues sur le parking du centre commercial éveillent son attention. Soit l’occasion pour Franck de donner enfin un sens à sa vie.
Certes, Jolivet frôle souvent le misérabilisme de circonstance, et certains dialogues enfoncent lourdement le clou de la métaphore sociale, mais il sait se rattraper à temps. Le dernier quart du film, qui voit le récit basculer de la chronique au thriller, sauve l’ensemble de l’académisme grisou.