Informers
Bret Easton Ellis, star du roman réaliste américain, semble voué à la malédiction de l’adaptation, puisqu'aucun de ses romans, du chef‑d’œuvre American Psycho (porté à l’écran par Marry Harron en 2000 avec Christian Bale) à Moins que Zéro (Marek Kanievska, 1987), n’a su être converti en un bon film. Seul Les lois de l’attraction (Roger Avary, 2002) a jusque‑là relevé le défi d’une retranscription fidèle et intelligente.
Avec Informers, Gregor Jordan adapte le roman éponyme de Ellis (encore inédit en France) et s’en sort plutôt avec les honneurs. Nous sommes bien dans les années 1980, tant du point de vue du casting (Kim Basinger, Mickey Rourke, Winona Rider) que de l’atmosphère dépeinte, entre oisiveté d’une jeunesse privée de repères (grande thèse des écrits de Ellis) et signes extérieurs d’un confort décadent. Des jeunes, mais aussi des moins jeunes, habitants aisés de Los Angeles, mènent une existence vide de sens et dénuée de boussoles morales.
Le film relate ainsi des fragments de ces vies décadentes, hantées par l’ennui et l’indifférence. Bien que considéré par ses exégètes comme le « moins bon » livre de Bret Easton Ellis, Informers donne à Jordan la matière d’un récit ouaté et étrange (même si tous les éléments fantastiques du roman ont été biffés), sorte de croisement insolite entre les films de Gus Van Sant et ceux de David Lynch. À noter enfin, la présence de Chris Isaak, icône des Eighties et présent dans A Fire Walk With me. Une bonne surprise.