par Laurence Mijoin
16 décembre 2011 - 12h29

I'm Still Here

année
2010
Réalisateur
InterprètesJoaquin Phoenix, Antony Langdon, Carey Perloff, Casey Affleck
éditeur
genre
notes
critique
7
10
A

En 2008, Joaquin Phoenix, après avoir brillé comme à son habitude dans Two Lovers, le drame new‑yorkais du talentueux James Gray, annonce qu'il arrête le cinéma pour se consacrer à sa nouvelle passion, le hip‑hop. Et, en effet, à part une obscure vidéo sur la Toile montrant « J.P. » en train de rapper en boîte de nuit, nous n'aurons plus aucune nouvelle de l'acteur pendant deux ans. Et pour cause : il tournait le documenteur I'm Still Here avec son beau‑frère Casey Affleck (première réalisation de ce dernier), dans lequel les deux compères poussent le canular jusqu'au bout, soit filmer la fausse retraite du comédien, mettre en scène son « caprice » de star et sa descente aux enfers. Affleck avoue finalement, avant la sortie du film, que l'affaire a été montée de toutes pièces.

Mais pour préserver le mystère et aller au bout du concept, il fallut, surtout à Phoenix, une sacrée dose de courage. Car lorsqu'il se rendait dans des talk‑shows pour assurer la promo de Two Lovers, personne n'était visiblement au courant de la supercherie. Ainsi, chez David Letterman, il fait face au public et aux téléspectateurs hirsute, ventripotent et taciturne, mâchouillant un chewing‑gum et finissant par le coller sur le bureau du présentateur… vexé que ce dernier se soit ouvertement moqué de son allure. On frôle le suicide médiatique.

Si, au départ, les deux amis souhaitaient faire une comédie (écrite de A à Z malgré les apparences et le côté improvisé), ils ont surtout profité du raz‑de‑marée qu'a déclenché l'annonce de l'acteur aux médias. Ainsi, peu à peu, le gag s'est mué en réflexion amère sur la manière dont Hollywood conditionne ses stars, les emprisonne dans un moule qui correspond à leur image médiatique, qu'importe si le portrait leur correspond ou non, s'ils s'y sentent à l'étroit.

Surtout, c'est la méchanceté avec laquelle les médias people parlent du nouveau look négligé de Joaquin Phoenix qui frappe ‑et Letterman en premier‑. Même s'il n'est plus que l'ombre de lui‑même (ou plutôt celle d'un homme des cavernes), le comédien est victime de la dictature de l'hygiène et du look qui fait la loi à Hollywood. Dictature qui a dépassé depuis longtemps les frontières du cinéma pour contaminer le monde entier, imposant des normes de beauté via la publicité, la mode.

Il y a du Sacha Baron Cohen ici (Borat, Brüno et bientôt The Dictator), dans les séquences d'orgies (prostituées, coke, alcool et délires scato), mais aussi dans l'impertinence avec laquelle Phoenix et Affleck s'attaquent au star system américain. Et il y a surtout une incroyable performance d'acteur, tour à tour horripilant, touchant, démentiel, parano et fichtrement drôle. Cela compense les faiblesses de ce film ovni trop long, parfois répétitif dans son propos, inabouti dans la comédie, pourtant son objectif premier. Une curiosité bancale mais à voir.

Quant à « J.P. », pas d'inquiétude : il ne fera jamais carrière dans le rap mais sera des prochains films James Gray et Paul Thomas Anderson. Ouf.

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dvd
cover
Tous publics
Prix : 19,99 €
disponibilité
24/11/2011
image
DVD-9, 103', zone 2
1.78
SD 576i (Mpeg2)
16/9 compatible 4/3
bande-son
Anglais DTS 5.1
Anglais Dolby Digital 5.1
sous-titres
Français (imposé)
7
10
image
Ce documenteur, filmé dans un style réaliste, comporte quelques séquences plus ou moins instables, ce qui semble inévitable. La qualité dépend donc grandement des conditions de tournage, mais s'avère globalement satisfaisante. On détecte quelques fourmillements sur certains plans sombres, mais dans l'ensemble, les noirs sont assez profonds et les teintes denses.
7
10
son
Le disque propose du DTS ou du Dolby Digital 5.1. On apprécie l'effort mais, hélas, le DTS ne se montre pas d'une grande utilité, la différence de qualité avec l'autre piste n'étant vraiment pas flagrante. Il en est de même pour la spatialisation, les canaux arrière se faisant très discrets. À l'instar de l'image, tout dépend donc de la qualité de la prise de son initiale ‑voir ce monologue de Joaquin Phoenix parasité par une saturation désagréable‑. Mais cela est peut‑être volontaire de la part de Casey Affleck, dans son souci de fabriquer de toutes pièces le réalisme d'un vrai documentaire. Enfin, les passages musicaux bénéficient d'une belle dynamique et de basses bien présentes.
0
10
bonus
- Aucun
Dommage que ce DVD ne soit accompagné d'aucun supplément, d'autant que le Blu‑Ray américain propose quant à lui une interactivité copieuse.
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