Hunt
1980. Corée. Suite à l’assassinat du président Park, le pouvoir appartient à nouveau à l’armée. La Corée du Nord tient à prendre la Corée du Sud et y envoie un espion. Park Pyeong‑ho (Lee Jung‑jae) et Kim Jung-Do (Jung Woo-sung), deux membres importants de la KCIA (services secrets sud‑coréens), ont pour mission de le traquer.
La Croisette à la maison
Pour son premier film en tant que réalisateur, l’acteur Lee Jung‑jae a réussi un coup assez improbable, puisque Hunt ‑c’est son titre‑ fut projeté l’an dernier au Festival de Cannes. En séance de minuit, certes, mais à Cannes tout de même ! L’acteur que le monde entier a découvert dans la série de Netflix Squid Game (N°456, c’était lui, un rôle qui lui permit de décrocher un Emmy) démontrait un sens inné de la caméra et un goût sûr pour les scènes d’action pures. Malheureusement, le grand public ne put découvrir ce nouveau prodige venu de Corée du Sud, puisqu’Hunt n’est jamais sorti en salles en France. Sa venue en 4K et Blu‑Ray, un an après son passage sur la Croisette, permet donc de rattraper un peu cette lacune.
Noir c’est noir
Hunt est à la croisée des chemins entre le film d’espionnage cérébral, tendance John Le Carré, et le film policier à la Heat (Michael Mann) dont il reprend d’ailleurs certains découpages, notamment dans une géniale fusillade en pleine rue. C’est un film dense, très dense, tant au niveau de l’intrigue que de la multiplicité des personnages. Mais on ne voit pas passer ses deux heures. La raison est sans doute à aller chercher dans son casting impeccable, en premier lieu duquel le réalisateur/acteur qui s’est attribué sans doute le meilleur rôle. Le jeu de chat et de la souris qu’il instaure avec son antagoniste n’est pas sans rappeler certains films de Melville. Elle est surtout à aller chercher dans sa cinégénie. Les images sont sublimes, et rien que d’un point de vue formel, le film mérite d’être vu.
Mais il y a de l’espoir
La légende voudrait que Lee Jung‑jae aurait annulé le tournage de Hunt et pris quatre années supplémentaires afin de peaufiner son histoire et réécrire son scénario. Si la légende dit vrai, c’est un peu dommage car le moins que l’on puisse dire, c'est que la clarté n’est pas le fort du film. À moins bien sûr d’être au fait de la géopolitique coréenne et des différences entre les divers services de police des deux Corée. Il faut en effet un peu s’accrocher pour suivre le film, surtout qu’il multiplie les retournements de situation, les rebondissements, les doubles jeux, et qu’il se plaît à ne pas vraiment indiquer comme tels ses flashbacks réguliers. En un mot : il faut s’accrocher ! Le film a une fâcheuse tendance à se perdre dans l’accumulation des twists (surtout finaux) et des sous‑intrigues. On sent que le réalisateur a voulu tout mettre dans sa première œuvre. Bien qu’assez maîtrisée, elle n’en demeure pas moins parfois indigeste, mais plaisante. En tout cas, un réalisateur est né.