Huit fois debout
Comme paralysée par un manque flagrant de confiance en elle, Elsa (Julie Gayet), sur le point d’être expulsée de son appartement, ne parvient pas à trouver d’emploi pour se sortir de ce cercle vicieux. Par conséquent, impossible pour elle de recevoir son fils de 10 ans dans des conditions décentes. Un jour, elle rencontre son voisin de palier, le lunaire Mathieu (Denis Podalydès), qui rate lui aussi tous ses entretiens d’embauche. Malgré les difficultés, ces deux exclus, inadaptés à la société dans laquelle ils sont contraints d’évoluer, vont trouver leur propre voie pour continuer à vivre. À leur manière.
Écrivain, Xabi Molia s’intéresse, pour son premier long métrage en tant que réalisateur, au destin de deux êtres vivant dans la précarité, car incapables de se fondre dans un moule où ils se sentent trop à l’étroit. Elsa et Mathieu étouffent, agonisent, oppressés par le monde qui les entoure, ce que retranscrit parfaitement la caméra de Molia en cadrant au plus près de ses protagonistes, comme pour mieux les enserrer. Le monde urbain va de pair avec la logique économique qui dicte la société et que nos deux antihéros réfutent, et c’est donc à ses marges, dans les forêts aux abords de la ville, qu’ils retrouvent un semblant de liberté.
Par bribes, le metteur en scène témoigne de son envie de livrer une fantaisie entre (sou)rires et larmes, lorgnant vers le cinéma indépendant américain avec son enrobage pop acidulé ‑ on pense notamment à Away We Go‑. Mais malgré le joli personnage de Podalydès, être bienveillant d’une franchise désarmante (lors d’un entretien d’embauche, il déclare que sa « plus grande qualité, c’est le doute », devant un recruteur interloqué), cette comédie douce‑amère ne parvient pas réellement à exister, escamotée par la volonté de réalisme social imprégnant tout le film ‑qui évite heureusement tout misérabilisme‑.
Ces deux losers magnifiques, parfaitement interprétés, auraient gagné à révéler toute leur singularité. Or, pour le personnage de Julie Gayet, c’est souvent le mutisme qui prend le dessus. On aurait aimé en savoir plus sur eux pour avoir envie de les suivre de bout en bout.