Gemini Man
Dans Gemini Man, Will Smith incarne Henry Brogan, un super assassin des services secrets américains qui souhaite prendre sa retraite. Le problème, c’est que son mentor, incarné par Clive Owen, ne l’entend pas de cette oreille et décide de le supprimer. Il envoie alors un tueur d'élite 25 ans plus jeune que Brogan, qui se trouve être son clone parfait (on ne trahit rien, la promo du film ayant principalement tourné autour de la prouesse technique du De‑Aging).
Pour orchestrer cet affrontement improbable entre le Will Smith d’aujourd’hui et celui de 1995, Ang Lee, réalisateur de L'odyssée de Pi et d'Un jour dans la vie de Billy Lynn, signe un film techniquement bluffant, aussi bien dans son utilisation des couleurs et des décors que dans sa mise en scène axée 3D (le film a aussi été projeté ainsi en salles), ou encore le rendu fluide et ultra‑réaliste induit par sa fréquence de tournage : 120 images par seconde en 3D contre 24 en 2D pour l’essentiel de la production internationale actuelle (hormis un certain Billy Lynn justement). Et Gemini Man propose effectivement une expérience visuelle inédite et bluffante en 4K Ultra HD. Beaucoup moins sur le plan narratif, malheureusement.
Un résultat qui découle d'un engouement qui fait rage à Hollywood chez les producteurs : être les premiers à utiliser une nouvelle technologie dès qu'elle fait son apparition, ici le De‑Aging, procédé qui consiste à rajeunir numériquement les acteurs à l'écran. Si, sur la forme, l’illusion entre le Will Smith d’aujourd’hui et sa version rajeunie est saisissante (amis du Prince de Bel Air, bonjour), elle en devient presque effrayante mise au service d’une histoire d’une banalité affligeante et d’un récit sans arrêt prévisible.
Un certain Martin Scorsese a récemment parlé « d'attraction de fête foraine » pour désigner un certain type de cinéma. Et ce Gemini Man en fait clairement partie à nos yeux, enchaînant les dialogues creux récités par des personnages extrêmement faibles voire caricaturaux, sacrifiés sur l'autel du spectacle à outrance. Au final, difficile de croire que le réalisateur de Gemini Man est aussi celui du bouleversant Brokeback Mountain.