Gainsbourg (vie héroïque)
De son enfance dans le Paris occupé d’avant la libération à la consécration internationale, Gainsbourg (vie héroïque) retrace et réinvente, sous forme de percées fantasmagoriques, l’itinéraire en chute libre de l’homme singulier, auteur‑compositeur de talent.
La vie héroïque de Lucien Ginsburg (1928‑1991) ressemble à une ritournelle dans laquelle la conquête des icônes solaires (les mois de passion fulgurante vécus avec Brigitte Bardot en 1967) ou noires (la rencontre avec Juliette Gréco), nourrit l’appétit d’infini du poète autoproclamé « maudit », compagnon de spleen à la dérive de Baudelaire. Gainsbourg (brillamment interprété par Éric Elmosnino, César 2011 du Meilleur interprète), figure profane, provocateur sacrifié, pourvu d’une « gueule » (de bois aux lendemains d’insomnies, embués d’alcool et de Gitanes vaporeuses).
Le biopic halluciné du dessinateur Johann Sfar (César 2011 du Meilleur premier film) emmène son héros dans un voyage de création perpétuelle, où même la Marseillaise est outrageusement colorée par les percussions sacrées d’un reggae insulaire. Avec lui et parfois contre lui, son double. Filiforme, élégant, avatar inquiétant de tous les excès, il lui indique sans scrupules les chemins de la perdition. Plus tard, Gainsbourg devient Gainsbarre et finit par s’échapper du cadre pour rejoindre la mer et le soleil. Un conte ébloui et plein de désenchantement.