Fedora
Fedora, légendaire actrice d’Hollywood, met fin à ses jours en se jetant sous un train. Retour arrière : quelques mois auparavant, Barry Detweiler, un producteur de cinéma sur le retour, tentait son va‑tout en lui proposant un film. Mais impossible d’approcher Fedora, qui vit recluse sur une île grecque. Detweiler décide d’aller rencontrer l’actrice, mais la garde rapprochée de Fedora l’en empêche si obstinément qu'il finit par s'interroger : Fedora serait‑elle prisonnière de ses proches ?
Un réalisateur de légende, Billy Wilder, réalise son dernier film indépendant (et son dernier grand film tout court) en s’attachant à une actrice de légende poursuivie par un homme sur le retour (William Holden). Pour le cinéphile, le film fait immanquablement écho aux thèmes développés par Wilder dans son monumental Boulevard du crépuscule qui mettait en scène, lui aussi, William Holden.
Mais les années ont passé : sur le visage de Holden ‑qui incarne clairement ici un alter ego de Billy Wilder livrant son dernier combat‑ et sur l’aura du réalisateur qui, lâché par ses producteurs américains, ne pourra réaliser Fedora que grâce à l’appui de financiers allemands. Ce changement d’époque sera d’ailleurs durement ressenti durant le tournage par Marthe Keller : l’actrice, habituée aux improvisations, aura beaucoup de mal à se couler dans la matrice de Billy Wilder où rien, du moindre geste au plus petit élément de décor, n’est dû au hasard.
Il est impossible d’analyser le film sans en griffer ou déflorer l’histoire. Fedora est en effet un constant jeu de faux‑semblants, une œuvre riche en ombres et pourtant paradoxalement inondée par la lumière des sunlights et le soleil hellénique. Malgré son écriture délicate et sa mise en image somptueuse (apparition de Fedora lorsqu’elle reçoit Henri Fonda), le film peut être vu comme un grand classique un peu tardif.
Un classique imparfait ‑certains coups de théâtre sont aujourd’hui prévisibles‑ mais un classique quand même car Fedora est rien moins que le plus sincère, le plus élégant, le plus bouleversant chant du cygne de l’âge d’or de Hollywood.