Fatal
Fatal Bazooka (Michaël Youn) est un rappeur comblé. Non content de cartonner au sommet des charts, de rouler sur l’or et de vivre une histoire enflammée avec la bimbo de luxe Athena Novotel (Isabelle Funaro, compagne de Youn dans la vie), il va bientôt ouvrir son propre parc d’attractions, baptisé Fataland. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes. Jusqu’au jour où débarque Chris Prolls (Stéphane Rousseau), chanteur « électro‑bio » très sûr de lui, qui se met en tête de lui voler la vedette… Déboussolé, Fatal va tenter de renouer avec ses origines qu’il avait dissimulées depuis le début de sa carrière. En effet, dur, dur d’être un gangsta quand on est né dans un village de Savoie…
Aujourd’hui, Michaël Youn est sans doute l’un des personnages les moins appréciés des médias. Et pour cause, ce dernier, à l’ego quelque peu surdimensionné, n’ayant jamais supporté la critique. Avec Fatal, le trublion prend des risques, puisqu’il a écrit, mis en scène et tenu le rôle principal de son premier long métrage. Son idée : prolonger cinématographiquement l’existence de sa création du Morning Live, le rappeur Fatal Bazooka, et en tirer une satire de l’industrie de la musique, des dérives de la notoriété et du show‑biz.
Artistes bichonnant leur image à grand renfort de spectacles et programmes caritatifs ou surfant sur la vague écolo, grands médias avides de juteux affrontements et de déchirements violents en direct, présentatrices usant de leur décolleté pigeonnant pour mieux s’offrir une place au chaud dans une grande chaîne de télé… Tout le monde y passe ou presque, attaqué par un Michaël Youn qui place sa mise en scène au niveau des sujets qu’il caricature. L’univers du hip‑hop, ici parodié jusqu’à plus soif, en prend pour son matricule : homophobe, misogyne et bling bling. Alors, évidemment, la forme épouse le fond : les gags, vulgaires, s’enchaînent, mais ce n’est que pour mieux assumer à fond la singerie, comme l’avait fait Sacha Baron Cohen avec Ali G, ou Ben Stiller avec Zoolander.
Sans aller jusqu’à comparer Youn à Stiller, l’ancien animateur de M6 surprend agréablement avec cette comédie dont on ne pourrait blâmer le côté lourdingue, puisque celui‑ci participe à la parodie, qui ne réside pas uniquement dans les sujets dont elle se moque, mais aussi dans les procédés stylistiques indissociables desdits sujets (le hip‑hop et ses clips grandiloquents, la société du spectacle et ses cadrages racoleurs et clinquants…). C’est en cela que Fatal ressemble à un gros kouglof, puisqu’il s’est rabaissé au niveau de ceux qu’il attaque. Mieux, le réalisateur en herbe ne se prive pas de critiquer la médiocrité artistique de la musique populaire, la montrant comme unique proposition culturelle dominante. On aurait simplement aimé qu'il fasse de même dans l’autocritique, tout juste esquissée via une séquence où il court, nu comme un ver, devant la foule. Car finalement, lui aussi a participé, avec des films comme Incontrôlable, à niveler par le bas la production cinématographique française…