Effie Gray
Au XIXe siècle, Effie Gray réalise son rêve en épousant le visionnaire critique d’art John Ruskin. La jeune femme déchante vite quand elle se rend compte qu’elle dégoûte physiquement son mari qui refuse obstinément de consommer leur union. Effie s’enferme dans un douloureux isolement mais garde une étincelle d'espoir en découvrant que John Everett Millais, un jeune artiste protégé par son mari, fait battre son cœur.
Cette reconstitution soignée d’un étonnant et authentique triangle amoureux louche très clairement et sans complexe vers les œuvres chics et stylées façonnées jadis par James Ivory (Chambre avec vue, Retour à Howards End, Les vestiges des jours).
Bien que servie par un casting talentueux, cette chronique amoureuse dysfonctionnelle, qui aurait pu être passionnante, peine à convaincre. La faute n’en revient pas à Dakota Fanning (Effie Gray) qui opte pour une assez fascinante interprétation conjuguant minimalisme du geste et intensité du regard. La réalisation, certes sans génie mais très appliquée et parfois inspirée (séquence de la maison du marais), n’est pas plus à (trop) blâmer.
La vraie chausse‑trape, le véritable écueil sur lequel le récit naufrage en partie, tient à son scénario et à son incapacité à dépeindre correctement John Ruskin, incarné par Greg Wise. La psychologie, le dégoût et la colère que ressent Ruskin à l’égard de son adorable femme ne trouvent aucune racine et restent une énigme. Le scénario se contente de croquer ce personnage, pourtant central dans cette incroyable histoire, comme un sale type doté de parents envahissants. C’est trop peu pour qu’on croit au calvaire d’Effie Gray, aux souffrances de son mari et que l’on suive sans flancher ce lent cheminement vers une liberté retrouvée.