Doctor Strange
Stephen Strange, arrogant neurochirurgien, est victime d’un accident qui lui brise irrémédiablement les mains. Après l'échec de diverses thérapies, Strange tente un voyage désespéré au Népal où résiderait un guérisseur réalisant des miracles : l’Ancien. Il finit par trouver l’Ancien, en fait une femme, qui va lui révéler la puissance de la magie et l’existence de multiples dimensions invisibles aux hommes qu’il faut protéger. Strange, d’abord narquois, devient un étudiant appliqué. Pendant ce temps, Kaecilius, un ex‑élève doué de l’Ancien, tente d’invoquer une entité monstrueuse qui risquerait d’absorber toute vie si elle arrivait sur Terre.
Porté par un Benedict Cumberbatch (Strange) qui excelle dans l’ironie cinglante et le second degré, ce film offre un courant d’air frais et vivifiant à l’univers ultra‑testostéroné des super‑héros. Les voyages et les bagarres interdimensionnels qui émaillent cette aventure offrent un contrepoint attrayant ‑mais très inspiré d’Inception‑ à un genre qui s’essouffle à force de culturisme.
Le film de Scott Derrickson modernise l’imagerie très datée du comics initial en tentant aussi quelques avancées audacieuses par rapport au matériel original. L’idée de confier le rôle de l’Ancien ‑dans la BD un moine tibétain caricatural‑ à Tilda Swinton avait fait bondir les fans. Elle s’avère au contraire un mini coup de génie grâce à l’interprétation subtile de la comédienne, particulièrement évidente lors de l'ultime scène du personnage.
Sans temps mort et sans perdre les spectateurs (un petit exploit au regard de l’univers barré de Doctor Strange), le film mène tambour battant une histoire intéressante : celle d’un égocentrique maladif qui se découvre une mission plus importante que son nombril. Benedict Cumberbatch n’est pas pour beaucoup dans cet aspect réussi du film : il y est essentiel. Nul autre que le comédien britannique n’aurait pu camper avec autant de brio un personnage à la fois détestable, émouvant, drôle et impressionnant. On est en revanche déçu par le méchant (Kaecilius) violent et binaire confié pourtant à l’excellent Mads Mikkelsen.
Le voyage au pays de Doctor Strange est riche et plaisant, mais souffre d’un final assez bâclé. Lors de sa confrontation finale face à une entité mortelle, Strange va en effet employer une ruse scénaristiquement très grossière qui désamorce, en partie, l'indéniable divertissement offert par le film.