Demolition
Faut‑il tout détruire à l'extérieur pour se reconstruire à l'intérieur ? Commencer par mettre en pièces ce foutu frigo dysfonctionnel, démonter vis après vis son ordinateur, littéralement abattre sa sublime maison d'architecte à coups de massue et de bulldozer ? Pas forcément, mais pour Davis Mitchell (Jake Gyllenhaal, qui d'autre pour ce rôle glissant mais fort ?), jeune banquier d'affaires qui vient de perdre sa femme, le deuil ne se pare ni de larmes ni de cris, mais plutôt d'un silence froid mêlé de pulsions destructrices, comme pour mieux se sentir vivant.
Film sur le déni, le paradoxe et la résilience, Demolition est loin de porter les gros sabots lacrymaux, préférant explorer les tréfonds et les infimes variations d'une âme à la fois meurtrie et confrontée à une évidence qui couvait depuis longtemps et que l'on apprendra plus tard. Malgré son sujet a priori lourd, le film du Canadien Jean‑Marc Vallée (Dallas Buyers Club) préfère ouvrir le champs des possibles, comme ce rapprochement incongru avec une mère isolée et son ado en plein doute identitaire.
À fleur de peau, passant du complet trois pièces aux Caterpillar de chantier, Jake Gyllenhaal donne au film toute son envergure et sa profondeur, autant que la mise en scène élégante et puissante de Jean‑Marc Vallée faite de flashs, de pétages de plombs et de coupures de son déstabilisants, bientôt remplacés par un cadre de plus en plus chaleureux et vivant. Un rite de passage poignant, d'une vie à une autre, sans pathos. À voir.