Il y a deux types de caméras cachées. Celles où le piégeur établit une véritable relation avec le piégé et fait rire de cet échange, toujours dans le respect de l'autre. On pense notamment aux désopilantes vidéos de François Damiens, alias François l'embrouille, beauf pur jus à l'origine de situations croquignolettes, voire totalement absurdes. Et il y a celles où le dindon de la farce ne sert qu'à mettre en valeur les facéties plus ou moins convaincantes du piégeur. C'est le cas de Connasse, programme court de moins de deux minutes désormais diffusé dans Le grand journal de Canal+ après avoir été mis en avant dans Le before du grand journal.
Portées par la comédienne de théâtre Camille Cottin, membre de la troupe de Pierre Palmade, ces pastilles humoristiques narrent les péripéties parisiennes d'une trentenaire sans‑gêne, snob, indélicate et grossière qui dit tout haut ce qu'elle pense, sans filtre. Bref, un prototype de connasse dans toute sa splendeur qui, en taxi, à vélib, dans une salle de sport, à la fête foraine, dans un bar gay ou encore dans une animalerie, va faire de son mieux pour faire sortir de leurs gonds ses pauvres victimes.
Des sketchs qui n'ont rien d'une improvisation puisque les deux réalisatrices et scénaristes Éloïse Lang et Noémie Saglio écrivent avec précision les répliques de Camille. Cette dernière fait d'ailleurs montre d'un culot monstre, balançant à une voyante qu'elle aurait mieux fait de lire son horoscope avant d'aller la voir, refusant de prendre une douche avant de plonger dans le grand bassin à la piscine, disant à un couple homo que « ça se soigne », vantant la douceur de la fourrure de chinchilla dans une animalerie ou aspergeant de déodorant l'aisselle d'un usager dans le métro…
Si le talent de Camille Cottin est indéniable et le comportement de la « connasse », individualiste et égoïste, un certain reflet de notre société, on peut se demander si ces caméras cachées n'auraient pas été plus mordantes et surtout plus drôles en accordant un peu plus de place aux « proies » de la connasse, et un peu moins à cette dernière, anti‑héroïne exaspérante qui tire un peu trop la couverture à elle. Suscitant rarement des réactions truculentes, ces micro‑séquences prêtes à consommer, dans la veine de Bref (autre format court qui a fait florès au Grand journal), ne provoquent finalement que quelques rires minimalistes.