par Nicolas Bellet
10 juin 2023 - 19h16

Babylon

année
2022
Réalisateur
InterprètesMargot Robbie, Brad Pitt, Diego Calva, Jean Smart
éditeur
genre
notes
critique
8
10
label
A

Babylon, le dernier film du réalisateur de LA LA Land vient de sortir en 4K Ultra HD. L’ascension puis la chute de quatre personnages, lors de la création d’Hollywood. Une plongée délirante dans ce qui fut sans aucun doute une ère de décadence et de dépravation sans limites : le cœur de la création mais aussi de la tempête.

 

Une déclaration qui déborde d’amour pour le cinéma

Charlie Chaplin aurait dit que « Du chaos naissent les étoiles ». Si la citation est véritable, le film de Damien Chazelle en est en tout cas la parfaite illustration. En 3h09, le film est une véritable orgie d’images, de musiques et de personnages. Un coup de poing tant aux rétines qu’aux oreilles qu’on ne saurait conseiller de le regarder dans les meilleures conditions techniques. Car Babylon est avant tout un film hommage au cinéma et fut totalement pensé pour être vu au cinéma. On vous aura prévenu !

 

On en ressort lessivé

Le film déborde de trop‑plein. C’est ce qui fait son charme mais c’est ce qui divise également. Margot Robbie est trop sexy, Brad Pitt trop looser magnifique, le pré‑générique trop long, le montage trop frénétique, la musique trop présente (la partie avec Tobey Maguire en trop)… Mais on en redemande, tellement on est entraîné avec Manny (Diego Calva) dans cette montagne russe qu’est le Los Angeles des années 20. Il sera notre guide durant tout le film et, comme le spectateur, en ressortira lessivé. Jack Conrad, le personnage interprété par Brad Pitt, lui dit à un moment du film qu’un plateau de tournage est l’endroit le plus magique au monde. Babylon en est une démonstration éclatante.

 

Grandeur et décadence

Le film se veut à l’image de ces années folles qui portaient diablement bien leur nom et surtout de leur épicentre hollywoodien. Il y réussit totalement, au risque malheureusement de perdre certains spectateurs. Ce n’est sans doute pas un hasard si Babylon fut un échec commercial aux USA. À peine compensé par son succès hexagonal. C’est un film de cinéphile qui s’adresse aux cinéphiles, mais pas seulement.

 

Un film sur la fascination qu’a pu exercer Hollywood et qui peu à peu disparaît. C’est même presque un film à clés où l’on reconnaît çà et là les légendes urbaines qui circulent sur l’histoire de l’usine à rêves, ses monstres sacrés désormais oubliés, la construction de ses mythiques studios et bien sûr le passage du muet au parlant qui balaya tout cela d’un coup, comme Stanley Donen l’avait si bien raconté dans Chantons sous la pluie. Film auquel Babylon rend d’ailleurs un hommage appuyé.

 

Le temps où l’on naissait star
Il ne faut cependant pas s’attendre à un métrage totalement flamboyant. Les histoires (d’amour) que raconte Damien Chazelle finissent mal en général. Et Babylon ne déroge pas à la règle. Car comme son titre le suggère, il raconte aussi et surtout l’histoire d’une chute. C’est un film empli d’une certaine mélancolie, sublimée par la dextérité de la caméra qui oscille entre plans‑séquences et hystérie.

Il raconte en substance la perte de l’innocence et de la douce folie hollywoodienne. C’est un film nostalgique d’un certain cinéma. Le cinéma du temps où, comme l’explique Nellie LaRoy (Margot Robbie), on ne devenait pas star, mais où l’on naissait star…

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4k
cover
Tous publics
Prix : 29,99 €
disponibilité
24/05/2023
image
1 UHD-99 + 1 BD-50 + 1 BD‑25, 189', toutes zones
2.35
HD 2 160p (HEVC)
HDR Dolby Vision
HDR10
16/9
bande-son
Français Dolby Digital 5.1
Anglais Dolby Atmos
Anglais Dolby TrueHD 7.1
Allemand Dolby Digital 5.1
Espagnol Dolby Digital 5.1
Italien Dolby Digital 5.1
sous-titres
Français, anglais, allemand, espagnol, italien, tchèque, hongrois, néerlandais, polonais, slovaque
10
10
image

Pulpeuse, choquante, festive, provocatrice, cramée, gorgée de couleurs et de sauts graphiques surprenants, volontiers déstabilisante, la photographie de Linus Sandgren et la vision de Chazelle pour Babylon sont à l'image du reste : débordants de générosité, jamais timorés, toujours too much. ici, la fadeur n'a pas sa place, l'équilibre non plus. Il faut que ça crache, que ça tape à l'œil, que ça brûle la rétine et imprime les mémoires. Mission réussie. Sans parler du « montage » final, aussi surprenant et inédit qu'intense.

 

Techniquement, le HDR Dolby Vision de cette version 4K galvanise tous les choix opérés : les rouges flamboyants, les contrastes fiers, le grain argentique, l'ambiance solaire et poussiéreuse des plateaux de tournage dans les pleines arides de LA, ou encore le glauque lardé de glamour pour la fête monumentale de Wallach, un mogul du cinéma sur les hauteurs de la ville. À chaque fois, Damian Chazelle parvient au miracle : faire que tout fonctionne ensemble, au sein d'un même film. Une prouesse rendue possible par un filmage impeccable en 35 mm et une créativité folle. Et que dire de ces scories volontaires (points blancs et autres petits « défauts »), pour prolonger la mise en abyme et la magie d'un cinéma disparu ? Sublime.

10
10
son

Une VO Dolby Atmos généreuse, hyper‑dynamique, dansante, festive, capitale pour le film comme pour ses personnages (Nellie ne vit que pour la danse et la musique). À la démonstration massive mais trop basique, Chazelle préfère donner du sens et des tonalités marquées à chacune de ses séquences phares, des fêtes orgiaques presque tribales à celles quasi autonomes qui ne pourraient tout simplement pas exister sans musique. Celle où le trompettiste Sydney Palmer récolte enfin les fruits de son labeur laisse peu à peu émerger des pulsations et un beat réjouissants qui resteront longtemps en tête. 

 

Justin Hurwitz, le proche collaborateur de toujours, signe une bande‑son tournoyante qui sonne comme dans les années 20 mais pimpée aux rythmes rock et dance plus actuels. L'effet est incroyable sur les spectateurs, frissons garantis. Et pour la petite info, les percussions que l'on entend lors de la première fête ont été enregistrées par Justin Hurwitz avec des sabots en bois frappés sur le sol de sa maison. 

 

Un dernier mot sur les effets hauteur et ciblés de Babylon, car il y en a, dont certains non sans un certain humour (voir la scène d'ouverture). 

8
10
bonus
- Babylon : une toile panoramique (31')
- Les costumes (3')
- La musique (3')
- Scènes coupées (9')

Le film le plus ambitieux de Damien Chazelle et toute son équipe à ce jour : 8 000 costumes au total (tous les pulls de Brad Pitt ont été tricotés main pour son look plus casual en dehors des fêtes), 60 décors, la partition la plus difficile jamais composée par Justin Hurwitz et jouée live pendant le tournage, des lieux mythiques (le cinéma fondé par Charlie Chaplin entre autres), des studios de cinéma à ciel ouvert en plein désert, le passage du muet au parlant… et une succession de fêtes toutes très différentes ayant leur propre ambiance, leur propre énergie. Un tournage monstre et une détermination sans faille d'une équipe hors du commun.

 

Et pour une fois, on ne fera pas l'impasse sur les scènes coupées, rien que et surtout pour le jeu des comédiens.

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