Avengers : Infinity War
Le titan Thanos est en train de collecter les dernières Pierres d’Infinité qui lui octroieront le pouvoir suprême sur l’univers. Et surtout celui de mener à bien son projet : éradiquer la moitié de la population de la galaxie pour rétablir l’équilibre du vivant avec la nature. Face au plus dangereux adversaire de leur histoire, les Avengers doivent s’allier au Docteur Strange, aux guerriers du Wakanda et aux Gardiens de la galaxie pour tenter de stopper Thanos. Pendant ce temps, Thor, que le titan a vaincu sans effort lors d’un premier affrontement, part à la recherche d’Eitri, un nain capable de lui forger une arme capable de terrasser l’invincible colosse.
Les grandes réunions de super‑héros aboutissent rarement à des films mémorables : trop de protagonistes, trop peu de présence et de substance à défendre à l’écran, inflation de lignes narratives divergentes et étriquées... Le récit pluriel est un défi qui aboutit souvent à des œuvres brouillonnes, Avengers l’ère d’Ultron bien sûr ou bien, dans l’écurie concurrente de Marvel, Justice League.
Tel n’est pas le cas d’Avengers : Infinity War. Car si le film convoque toutes les grandes figures de l’univers Marvel, c’est pour mieux les catapulter sur Thanos, méchant plus grand que nature, extrêmement charismatique et impressionnant. Même si quelques personnages font clairement de la figuration dans le récit (Captain America, Natasha Romanoff, Loki), il faut saluer l’effort.
Thanos, apparu brièvement dans le premier Gardiens de la galaxie, avait été aperçu tout aussi fugitivement dans quelques autres films suivants. Cette fois, le titan est le moteur principal du récit. Joué en capture de mouvement par Josh Brolin qui mobilise tout son talent pour donner au monstrueux personnage une expressivité étonnante et même une humanité paradoxale, Thanos offre à Marvel le Graal de tout bon récit d’aventures : un méchant inoubliable. Un antihéros d’autant plus troublant que Thanos est animé de « bonnes » intentions. Le titan offre au récit non seulement un défi prodigieux aux Avengers mais aussi de nombreuses scènes poignantes, notamment avec ses filles adoptives que sont Gamora (Zoe Saldana) et Nebula (Karen Gillan).
Peu à peu, la tragédie se met en place et il faut aussi louer le tandem de réalisateurs (Joe et Anthony Russo) pour leur aptitude à mener de front plusieurs intrigues se déroulant en même temps sur Terre et aux confins de la galaxie. Si le film n’échappe pas au péché véniel de Marvel, un souvent agaçant flux de vannes qui tombe parfois très mal par rapport à la dramaturgie, Infinity War propose, avec un tempo pour le coup sans faille, des moments de bravoure incroyables (traque de Vision en Écosse, bataille sur Titan, assaut du Wakanda) associés à des séquences denses en émotion (la collecte de la Pierre de l’âme, le dernier round des Avengers, le choix cornélien de Vision).
Contrairement à ce qu’affecte de croire Kevin Feige, le patron des studios Marvel dans les bonus, Infinity Wars n’est néanmoins pas une tragédie shakespearienne. Les films de super‑héros n’ont toujours pas trouvé la bonne recette pour éviter les confrontations de catch entre leurs protagonistes, mais il faut reconnaître à Marvel d’avoir su concentrer autour de Thanos une trame beaucoup plus nourrissante que d’ordinaire. Mieux qu’un scénario plus musclé et qu’un très bon méchant, Infinity Wars ose un épilogue particulièrement audacieux. On n’en dira évidemment pas un mot pour éviter tout spoil, mais la bataille réserve quelques beaux crève‑cœur et une surprise finale qui surprendra même le plus blasé des fans de Marvel.