par Carole Lépinay
18 mai 2021 - 06h39

Asphalte

année
1981
Réalisateur
InterprètesCarole Laure, Jean Yanne, Jean-Pierre Marielle, Étienne Chicot, Louis Seigner, Georges Wilson
éditeur
genre
notes
critique
8
10
A

31 juillet, jour de départ en vacances. Juliette (Carole Laure) saute dans une voiture qui ne lui appartient pas afin de retrouver son amant ; un père déboussolé erre au milieu du trafic incessant tandis qu’Albert Pourrat (Jean‑Pierre Marielle en beauf patenté) apprend que son fils ne remarchera plus… L’autoroute a manifestement le pouvoir de vie ou de mort sur ses vulnérables usagers.


Film inclassable, Asphalte de Denis Amar (L’addition, Hiver 54 l’abbé Pierre) prend l’autoroute des vacances comme l’initiatrice de la destinée d’une poignée d’automobilistes. Lancés dans une quête systématiquement contrariée, Juliette et ceux qu’elle ne croisera pourtant jamais deviennent égaux et vulnérables face aux aléas parfois violents de la route.

 

Outre la formidable image chorale d’un flux humain tendu vers un horizon (le Sud) manifestement hors de sa portée, le cinéaste fait preuve d’une grande audace esthétique. Filmé au ralenti, l’impressionnant carambolage suspend l’échéance, les voitures sont broyées, toutes bonnes pour la casse, comme autant de parcelles de vie accidentées, pétrifiées dans la chaleur et le bitume implacable. Un premier film envoûtant porté par la lumineuse Carole Laure.

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Tous publics
Prix : 19,99 €
disponibilité
24/03/2021
image
1 BD-50 + 1 DVD-9, 98', zone B
1.77
HD 1 080p (AVC)
16/9
bande-son
Français DTS-HD Master Audio 2.0 (mono doublé)
sous-titres
Français pour sourds et malentendants
5
10
image

Quasi disparu depuis sa sortie, c'est un réel plaisir de redécouvrir le film de Denis Amar dans de telles conditions. Certes, la copie ne ressemble à rien de ce que l'on fait aujourd'hui, mais tel n'est pas le but, en réalité. Studiocanal a privilégié le rendu original argentique, éliminé tous les défauts de master, travaillé les blancs et les contrastes (quoiqu'un peu durs encore). La définition de l'époque est douce, oui, mais le sens esthétique du film est préservé. Au fond, une assez belle copie compte tenu de l'âge du film malgré certaines limites techniques.

5
10
son

Un peu agressive sur certains passages, cette stéréo (mono doublé) est aussi très vivante. Dans ce film choral, les flux sonores s'entrecroisent sans jamais vraiment s'entremêler. Les dialogues sont clairs par ailleurs, aucun gros souci.

8
10
bonus
- Préface de J-B Thoret (7')
- Asphalte revu par Denis Amar (54')
- DVD du fim

J‑B Thoret nous propose une présentation du film concise mais toujours très bien documentée. Inclassable dans l’histoire du cinéma français, Asphalte rejoint une série de films qui n’appartiennent à aucun genre et à aucune catégorie prédéfinie, parmi eux, France Société Anonyme (1973) d’Alain Corneau, Attention, les enfants regardent (1978) de Serge Leroy ou encore l’œuvre énigmatique d’Alain Jessua (Les chiens, paradis pour tous).

 

Comparé à tort avec Le grand embouteillage de Luigi Comencini, Asphalte est un film d’autoroute incontestablement à l’opposé de ce drame en huis clos réalisé deux ans plus tôt. Denis Amar revient sur le tournage de son premier film et nous propose un entretien captivant, enrichi d’anecdotes et porté par sa vision singulière du cinéma.

 

Le réalisateur évoque la patte fondamentale du scénariste Jean‑Pierre Petrolacci, dont l’ivresse a inspiré le mystérieux personnage du Cousu et sa corsitude sanguine, l’imposant dogue de Jean Yanne. Pressentie pour interpréter le rôle principal, Jane Birkin sera finalement remplacée par Carole Laure suite à une décision de la production (idem pour le vieux monsieur de la casse joué par Louis Seigner, dont Amar loue l’extrême précision dans la diction, un temps pensé pour Henri Salvador).


Le réalisateur garde le souvenir d’un tournage joyeux, favorisé par sa grande expérience d’ancien assistant (il a travaillé aux côtés de Jean Delannoy, René Clément, Philippe de Broca…). Une connaissance empirique du cadrage et de la lumière qui lui a permis d’appréhender le côté technique en toute sérénité. Celui qui confie avoir tout appris de Jean‑Luc Godard, tout en se défendant de toute comparaison, revendique une prédilection pour l’étrangeté, les gros plans poétiques et bouleversants dont on ignore l’origine.

 

Enfin, si Denis Amar devait exprimer un regret concernant Asphalte, il trouverait une autre manière d’incarner cette fameuse étrangeté à la toute fin du film, il saisirait le chaos de l’autoroute qui poursuivrait son flux et laisserait la valise de Juliette oubliée.

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