Armageddon Time
Le Queens, dans les années 80. Paul Graff (Banks Repeta) se fait remarquer auprès de M. Turkeltaub (Andrew Polk) dès son premier jour en classe de 6ème. Préférant le dessin (son prof croqué avec un corps de canard) à la discipline, le gamin effronté peut compter sur le soutien indéfectible de Johnny (Jaylin Webb), un redoublant afro‑américain sans cesse réprimandé par l’instit pétri d’aprioris. À la maison, c’est grand‑père Aaron (magnifique Anthony Hopkins) qui endosse le rôle du meilleur ami, car Paul peine à trouver sa place entre son grand frère Ted (Ryan Sell) et des parents qui ne le comprennent pas toujours…
Une transition dans le cinéma de James Gray
Succédant à des fresques monumentales dans les contrées reculées du Nouveau monde (The Lost City of Z, 2016) ou dans l’espace et son infinie solitude (Ad Astra réalisé en 2019 avec Brad Pitt et Tommy Lee Jones), Armageddon Time s’impose comme une transition dans le cinéma de James Gray. Encore que les expéditions « macro » de Percy Fawcett et Roy McBride posent, à travers les contradictions de leur quête intérieure, les prémisses du parcours initiatique du jeune Paul/James.
La filiation, un thème essentiel
Retour dans le quartier natal du cinéaste donc, dont les souvenirs se distillent entre les murs de la maison familiale décorée quasi à l’identique et une école privée dirigée par Fred Trump (John Diehl), célèbre homme d’affaires et promoteur immobilier (père de l’ancien président des États‑Unis). Derrière les grilles de l’enceinte réservée à l’élite américaine, Paul prend à la fois conscience du regard des autres et de son pouvoir d’agir (ou pas) face aux terribles réflexions discriminantes des élèves en uniforme à propos de son ami Johnny.
Thème essentiel de la filmographie de Gray, la filiation (contrariée, impossible, perdue mais fondamentale) n’aura jamais paru aussi authentique à travers la relation fusionnelle entre le gamin intrépide et son adorable grand‑père rescapé de la Shoah.