Né en captivité, un jeune singe capucin se retrouve, après l'accident d'avion qui le transportait, perdu au cœur de la forêt amazonienne. Désemparé, il va devoir s'adapter pour survivre aux nombreux dangers que dissimule la jungle. Se nourrir, se protéger des prédateurs mais aussi de la toute‑puissante Nature : long est le chemin qui mène à la liberté…
Choisir un animal attendrissant et en faire le héros et fil rouge d'un film : voilà la nouvelle tendance des documentaires animaliers, plus exactement des docufictions où chaque séquence est story‑boardée, scriptée et mise en scène. À la manière de Disneynature et son Chimpanzés, Amazonia de Thierry Ragobert (La planète blanche) cible donc en premier lieu le très jeune public, censé s'attacher au petit primate, trembler, rire, s'émerveiller, en suivant chacune de ses aventures.
En évitant de faire parler le singe via une voix off, Amazonia nous épargne toutefois l'anthropomorphisme, plaie qui handicape de plus en plus de documentaires (dont Chimpanzés, justement), sous prétexte de vouloir susciter l'empathie du spectateur, quel qu'il soit (enfant ou adulte, personne déjà sensibilisée à la cause environnementale ou non…).
Malgré cela, on ressent une certaine frustration face à cet Amazonia dont l'ambition et l'ampleur du tournage (deux ans, sans compter la préproduction et la postproduction, complexité des prises de vues en 3D, humidité et chaleur insoutenables…) sont diminuées par le choix de narration initial. Bien entendu, les images sont splendides. Le bestiaire (jaguar, mygale, harpie ou encore dauphin rose) évoluant dans une nature primitive est sublimé par l'esthétique quasi cinématographique du film. Mais est‑ce suffisant pour un public qui attend plus d'un tel projet aux moyens conséquents qu'un simple beau livre d'images ?
Car il y a un paradoxe à vouloir montrer une nature virginale en la mettant en scène avec tant d'artifices (la scène de bad trip du singe après un repas de champignons pas très digestes, en réalité des fruits recouverts de confiture, déjà vue dans L'ours de Jean‑Jacques Annaud). Le dessein du réalisateur est clair : rendre gloire à la beauté des lieux, tant menacés par la déforestation. L'entreprise, titanesque, est sincère. Mais vouloir à tout prix tirer une fiction du matériau de base dénature justement cette nature brute, cherche à la rendre consommable pour le plus grand nombre. On l'aurait aimée simplement contemplative.