Acab : all Corps Are Bastards
Mais que fait la justice ? Telle pourrait être la question épinglée au fronton d’un genre qui connut son heure de gloire au cours des années 70, entre les premières actions musclées conduites par les Brigades Rouges et l’assassinat d’Aldo Moro en 1978.
Que fait la justice, donc ? Pas grand‑chose si l’on en croit la plupart des films réalisés au cours de l’âge d’or du cinéma italien qui, tous genres confondus, dressaient grosso modo le même constat sur l’état de corruption généralisée d’une société plombée par la mafia et le terrorisme. Le polar italien, dit le « poliziottesco », naît officiellement en 1972 avec La polizia ringrazia de Steno et, après le western‑spaghetti qui vit alors ses dernières heures, prospère sur une période de troubles politiques et sociaux.
Le développement de la criminalité, les kidnappings, les affaires de corruption, le laxisme et l’impuissance de la justice, forment le terreau d’un genre, aussi ouvertement pamphlétaire que les fables politiques de Francesco Rosi (Cadavres exquis), d’Elio Petri (Enquête sur citoyen de tout soupçon) et du grand Damiano Damiani.
Avec All Cops Are Bastards, Stefano Sollima reprend la ligne de ce genre populaire et transpose ses personnages, son type de récit et sa morale ambiguë au sein de l’Italie contemporaine. Adriano, une jeune recrue des CRS transalpins, découvre la réalité de ce peloton où il vient d’être muté, entre maintien de l’ordre musclé, mépris de la population et vie intime réduite à néant.
All Cops Are Bastards avance comme un char d’assaut, armé d’un récit aussi efficace que polémique (transgresser la loi pour faire respecter l’ordre) et témoigne du regain de forme du cinéma de genre italien. Enfin, Stefano Sollima sait de quoi il parle, puisque son père n’est autre que Sergio Sollima, cinéaste phare du cinéma italien des années 1970, auteur de westerns mémorables (Colorado) et d’une poignée de classiques du polar italien (Revolver).