le 14 janvier 2019 - 18h11

John McTiernan, l'homme aux deux visages

On pourrait diviser la carrière de John McTiernan en deux phases. La première s’étale de 1986 (date de son premier film, Nomads) à 1995 (Une journée en enfer, troisième opus de la série des Die Hard), et fait de lui un cinéaste américain de tout premier plan. De sa seconde période, moins glorieuse, on retient surtout ses énormes difficultés à travailler avec les majors…

A

Les déboires successifs du 13e guerrier, Thomas Crown et Rollerball ont mis McTiernan sur la touche du système hollywoodien. Après ces trois films mutilés et remontés, qui se sont à chaque fois soldés par un échec, le cinéaste s'est retrouvé dans une position comparable à celle de John Carpenter au milieu des années 80, contraint après les bides de The Thing, Christine, Starman et Jack Burton, de retourner dans le giron de productions plus modestes.

 

Nomads, les débuts

À l’heure où l’on parle, le sort s’est acharné sur lui : en banqueroute après un passage par la case prison pour écoutes illégales du producteur de Rollerball, on espère que les choses tourneront de nouveau un jour à son avantage… John McTiernan est né en 1951 dans l’État de New York. Après de brillantes études à l’Université de New York, il intègre l’American Film Institute et y fait ses premières armes, notamment sur un court métrage, Watcher. Afin de gagner sa vie, il écrit en même temps une série de scripts publicitaires et travaille à la rédaction de son premier scénario de long métrage. Ce sera Nomads (1986), un film inclassable qui raconte les aventures mystiques d’un anthropologue et d’un médecin (Pierce Brosnan à ses débuts), partis à la recherche d’une bande de nomades mystérieux. Le film obtient un succès public d’estime et critique important, suffisant pour lui ouvrir l’année suivante les portes de Hollywood.

 

Predator, le coup de maître

Sa première expérience dans le cadre d’une major sera un coup de maître : avec Predator, il plonge Arnold Schwarznegger au cœur d’une jungle infestée par un extraterrestre invisible. Huis clos à ciel ouvert, mélange de film de guerre et d’horreur, Predator démontre les talents de son auteur et sa science de l’action cinématographique. En 1988, John McTiernan accède définitivement au rang de réalisateur‑star en signant une œuvre qui allait révolutionner le film d’action américain : Piège de cristal. Le réalisateur montre ses qualités de metteur en scène capable d’exploiter toutes les ressources d’un même lieu (ici, un building de verre), fait preuve de trouvailles visuelles remarquables (la fusillade au milieu des vitres), et invente avec le personnage de John McLane (Bruce Willis) l’archétype du héros nonchalant et distancié, maniant la réplique cinglante et les armes avec la même dextérité.

 

Arnold Schwarzenegger dans Last Action Hero (1993)

Arnold Schwarzenegger dans Last Action Hero (1993)

 

Last Action Hero, culte sur le tard

En 1990, le cinéaste adapte Tom Clancy (À la poursuite d’Octobre Rouge), retourne dans la jungle pour Medecine Man et signe trois ans plus tard l’un de ses films les plus intelligents. Réflexion brillante sur les mécanismes du film d’action, Last Action Hero sort un personnage (Schwarznegger) de son univers pelliculé et le confronte à la réalité, là où les méchants ne sont pas de marbre, là où les coups de poing laissent des traces… Le film, qui prend à rebrousse‑poil le principe de l’identification, laisse pantois le public, qui le boude. En 1998, il boucle la trilogie Die Hard et retrouve le succès. Un an plus tard, il décide d’adapter un roman de Michael Crichton, Les mangeurs de morts, le rebaptise Le 13e guerrier, et les ennuis commencent…

 

13e guerrier, le tournant fatal

Le tournage du 13e guerrier en Colombie Britannique laisse apparaître de graves dissensions entre McTiernan et Crichton, insatisfait du travail accompli. Amputé, remonté pendant plus de deux ans, le film sort enfin en 2001 mais n’est que l’ombre du projet initial. La malchance poursuit McTiernan qui, après avoir tenté de se remettre en selle avec le remake de L’affaire Thomas Crown, tourne Rollerball. La Warner, jugeant le film trop violent, supprime de nombreuses séquences et blanchit numériquement le sang sur les visages et les décors. Aujourd’hui, John McTiernan est au fond du trou, mais beaucoup attendent son retour…

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